OPPOSITION n° B 2 602 517
H-D U.S.A., LLC, 3700 West Juneau Avenue Milwaukee, Wisconsin 53208, Etats-Unis (d’Amérique) (opposante), représentée par Matthys & Squire LLP, The Shard 32 London Bridge Street, London SE1 9SG, Royaume-Uni (mandataire agréé)
c o n t r e
Jürg Schmidiger, Tiechestrasse 7, 8037 Zürich, Suisse (titulaire), représenté par Iliana Marinova, 6 Trapezitsa Str Fl.1 Office 4, 1000 Sofia, Bulgarie (mandataire agréée).
Le 14/07/2017, la division d’opposition rend la présente
DÉCISION:
1. L’opposition n° B 2 602 517 est rejetée dans son intégralité.
2. L’opposante supporte les frais, fixés à 300 EUR.
MOTIFS:
L’opposante a formé une opposition à l’encontre de tous les produits visés par l’enregistrement international désignant l’Union européenne n° 1 236 951. L’opposition est fondée sur les enregistrements de l’Union européenne n° 83 931, n° 2 134 500 et n° 1 797 018 ainsi que sur les enregistrements du Royaume-Uni n° 2 121 230, n° 1 341 823 et n° 1 271 222 en relation avec lesquels l’opposante a invoqué l’article 8, paragraphe 1, point b), et l’article 8, paragraphe 5, du RMUE. L’opposition est également basée sur deux marques notoirement connues dans chaque état-membre de l’Union européenne au sens de l’article 6bis de la Convention de Paris, invoquées sur la base de l’article 8, paragraphe 2, point c) en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE et sur deux marques non enregistrées utilisées dans la vie des affaires au Royaume-Uni et en Irlande, invoquées sur la base de l’article 8, paragraphe 4, du RMUE.
REMARQUE PRELIMINAIRE
Dans ses observations en réponse à l’opposition, datées du 09/11/2016, le titulaire manifeste son désaccord avec la langue de procédure choisie par l’opposante et validée par l’Office, à savoir le français. Il indique avoir protesté auprès de l’Office ainsi que de l’OMPI et de l’Institut de la propriété intellectuelle suisse en indiquant qu’il n’était pas en mesure de mener la procédure d’opposition dans une langue qu’il ne maitrise pas et qui n’est pas, de surcroît, la langue maternelle de l’autre partie.
Un acte d’opposition peut être déposé dans la première ou la deuxième langue de la marque contestée, à la convenance de l’opposante, si la première langue est l’une des cinq langues de l’Office (Article 119, paragraphe 6, du RMUE et Règle 16 et règle 38, paragraphe 1, du REMUE). En l’espèce, les langues de l’enregistrement international contesté sont le français (première langue) et l’allemand (deuxième langue). Ainsi, le choix du français comme langue de procédure par l’opposante est correct. Les parties peuvent convenir d’une autre langue parmi les langues officielles de l’Union européenne mais en l’espèce aucune pièce au dossier ne permet d’établir un accord des deux parties sur ce point.
Compte tenu de ce qui précède, la division d’opposition confirme que la langue de procédure dans le cas d’espèce est le français.
FAITS, PREUVES ET OBSERVATIONS À L’APPUI DES DROITS ANTÉRIEURS
Conformément à l’article 76, paragraphe 1, du RMUE, au cours de la procédure, l’Office procède à l’examen d’office des faits; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.
Il s’ensuit que l’Office ne peut pas tenir compte de prétendus droits dont l’opposante n’a pas produit de preuve appropriée.
Conformément à la règle 19, paragraphe 1, du REMUE, l’Office donne à l’opposant l’opportunité de présenter les faits, preuves et observations à l’appui de son opposition ou de compléter les faits, preuves et observations d’ores et déjà présentées avec l'acte d'opposition, dans un délai fixé par l’Office.
Conformément à la règle 19, paragraphe 2, du REMUE, au cours du délai visé ci avant, l’opposant produit également la preuve de l’existence, de la validité et de l’étendue de la protection de sa marque antérieure ou de son droit antérieur, ainsi que des éléments de preuve de son habilitation à former opposition.
En particulier, si l’opposition est fondée sur une marque enregistrée qui n’est pas une marque de l’Union européenne, l’opposant doit produire une copie du certificat d’enregistrement correspondant et, le cas échéant, du dernier certificat de renouvellement, attestant que le délai de protection de la marque dépasse le délai visé au paragraphe 1 et de toute extension de celui-ci, ou tout autre document équivalent émanant de l’administration auprès de laquelle la demande de marque a été déposée (règle 19, paragraphe 2, point a), sous ii), du REMUE).
Conformément à la règle 19, paragraphe 3, du REMUE, les informations et les preuves visées aux paragraphes 1 et 2 sont présentées dans la langue de procédure ou accompagnées d’une traduction. La traduction est produite dans le délai fixé pour la production du document original.
En l’espèce, la preuve produite par l’opposante en relation avec les enregistrements du Royaume-Uni n° 2 121 230, n° 1 341 823 et n° 1 271 222 est en anglais, qui n’est pas la langue de procédure.
En date du 16/12/2015, l’opposante s’est vu accorder un délai de deux mois à compter de la fin du délai de réflexion pour produire la preuve requise et la traduction correspondante. Ce délai a été prolongé et est arrivé à expiration le 21/06/2016.
L’opposante n’a pas présenté les traductions requises.
Conformément à la règle 19, paragraphe 4, du REMUE, l’Office ne prend pas en considération les observations écrites ou documents ou parties de ceux-ci qui ne sont pas présentés ou qui ne sont pas traduits dans la langue de procédure, dans le délai imparti par l’Office.
Il s’ensuit que la preuve produite par l’opposante en relation avec les marques susmentionnées ne peut être prise en considération.
Conformément à la règle 20, paragraphe 1, du REMUE, si, avant l’expiration du délai visé à la règle 19, paragraphe 1, l’opposant ne prouve pas l’existence, la validité et l’étendue de la protection de sa marque antérieure ou de son droit antérieur, ainsi que l’habilitation à former opposition, l’opposition est rejetée comme non fondée.
Dès lors, il y a lieu de rejeter l’opposition comme non fondée dans la mesure où elle est basée sur les enregistrements du Royaume-Uni n° 2 121 230, n° 1 341 823 et n° 1 271 222.
L’examen de l’opposition se poursuit sur la base des autres droits invoqués par l’opposante.
RENOMMÉE – ARTICLE 8, PARAGRAPHE 5, DU RMUE
Pour des raisons d’économie de procédure, la division d’opposition examinera en premier lieu l’opposition fondée sur la marque antérieure de l’Union européenne n° 83 931, au titre de laquelle l'opposante prétend jouir d’une renommée dans l’Union européenne et dans chaque état-membre de l’Union européenne.
Conformément à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE, sur opposition de la titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque contestée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d'une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice
Il résulte de ce qui précède que les motifs de refus prévus à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE ne sont applicables que si les conditions suivantes sont remplies :
- les signes doivent être identiques ou similaires ;
- la marque de l’opposante doit être renommée. La renommée doit également être antérieure au dépôt de la marque contestée ; elle doit exister dans le territoire concerné et pour les produits et/ou services pour lesquels l’opposition a été formée ;
- risque de préjudice : l’usage de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice.
Les conditions susvisées sont cumulatives et l’absence de l’une d’elles entraîne donc le rejet de l’opposition au titre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE (16/12/2010, T-345/08, et T-357/08, Botolist / Botocyl, EU:T:2010:529, § 41). Il y a lieu de noter, toutefois, que le fait que toutes les conditions susvisées soient remplies peut ne pas suffire. En effet, l’opposition peut encore être rejetée si le titulaire démontre un juste motif pour l’usage de la marque contestée.
En l’espèce, le titulaire n’a pas invoqué un juste motif pour utiliser la marque contestée. Dès lors, en l’absence de toute indication contraire, il convient de supposer qu’il n’existe pas de juste motif.
- Les signes
HARLEY
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Marque antérieure |
Marque contestée |
Le territoire pertinent est celui de l’Union européenne.
La marque antérieure est constituée du seul élément verbal « HARLEY » qu’une partie du public, notamment le public de langue anglaise, identifiera comme un prénom masculin ou féminin ou encore comme un nom de famille. Une partie du public ne lui attribuera aucune signification. Le terme ne présente pas de lien au regard des produits couverts par la marque antérieure, qui relèvent des classes 9, 12, 14, 25 et 26, et doit être considéré comme étant distinctif.
La marque contestée est constituée des deux éléments verbaux « Harlie » et « Charper » dans une représentation particulièrement spécifique et originale. Le public de langue anglaise percevra l’expression comme une variante du prénom « Harley » féminin suivi d’un nom de famille. Compte tenu des majuscules aux initiales, de la représentation spécifique qui peut rappeler une signature, la division d’opposition est d’avis que l’ensemble du public de l’Union européenne identifiera l’expression comme un prénom et un nom. Les éléments verbaux en question ne présentent pas de lien par rapport aux produits couverts par la marque contestée (classes 3, 15 et 25), et sont donc distinctifs. Il convient de remarquer que, dans les marques composées d’un prénom et d’un nom de famille, les noms de famille ont en principe une valeur intrinsèque supérieure à celle des prénoms en tant qu’indicateurs de l’origine commerciale des produits. Les cas où le prénom est particulièrement rare peuvent constituer une exception à ce principe. Dans le cas présent, le prénom « Harlie » est peu fréquent mais le nom de famille « Charper » ne l’est pas davantage (quel que soit le territoire de l’Union européenne pris en compte et notamment les territoires de langue anglaise) de sorte que le principe général est applicable, à savoir le public pertinent attribuera plus d’importance au nom de famille « Charper ».
La division d’opposition prend note de la remarque de l’opposante selon laquelle le mot « CHARPER » est proche du mot existant anglais « CHOPPER » qui désigne un type de moto qui, selon l’opposante, est fréquemment utilisé pour désigner ses propres motos. Selon l’opposante, ceci tend à réduire la différence induite par le terme. La division d’opposition est d’avis que l’argument de l’opposante n’est pas crédible et que le terme « CHARPER » ne saurait être confondu avec le mot « CHOPPER » notamment lorsqu’il est utilisé avec le prénom « HARLIE », ceci d’autant plus que la marque contestée ne couvre pas des motos ou accessoires de motos (classe 12) mais des produits dans les classes 3, 15 et 25. L’argument de l’opposante est donc rejeté.
Les marques ne comportent pas d’élément dominant.
Il est à noter que l’usage exclusivement de lettres majuscules dans le signe antérieur n’influence pas la comparaison visuelle des signes car la marque est de nature verbale et ainsi protégée pour une représentation en minuscules, en majuscules ou même une alternance de minuscules et majuscules.
Visuellement, le seul élément de la marque antérieure « HARLEY » et le premier élément verbal de la marque contestée « HARLIE » sont similaires car leurs quatre premières lettres « HARL » sont identiques et ils ne diffèrent que par la position du « E » et par leurs lettres « Y » et « I ». Cependant, les marques diffèrent clairement par l’élément « CHARPER » de la marque contestée constitué de sept lettres, ainsi que, de manière manifeste, par leur structure (un seul élément verbal contre deux) et la représentation spécifique des lettres dans la marque contestée qui, sans constituer un facteur décisif car il s’agit d’un aspect décoratif, est suffisamment marquée et originale pour être remarquée par les consommateurs confrontés à la marque.
Compte tenu de ce qui précède, les signes sont visuellement similaires à un faible degré.
Phonétiquement, les termes « HARLEY » et « HARLIE » sont prononcés de manière identique par le public de langue anglaise. Les signes diffèrent ainsi par l’élément « CHARPER » de la marque contestée. Ainsi que le souligne l’opposante, la concordance porte sur le premier élément de la marque et les consommateurs ont généralement tendance à se concentrer sur le début des signes. Cependant, dans le cas présent, ceci se trouve largement contrebalancé par le fait que c’est l’autre élément, « CHARPER » qui sera perçu par le public comme le principal indicateur de l’origine commerciale des produits.
Ainsi, les signes sont phonétiquement similaires à un moyen degré pour le public anglophone.
Pour le reste du public, les terminaisons des éléments « HARLEY » et « HARLIE » ne sont pas identiques et les signes sont phonétiquement similaires à un faible degré.
Conceptuellement, il est important de souligner que le public de langue anglaise percevra « HARLEY » et « HARLIE » comme des variantes du même prénom mais il ne s’agit pas de prénoms identiques et l’un n’est pas le diminutif de l’autre. Les deux marques contiennent ainsi le concept d’un prénom similaire. Compte tenu du fait que la marque contestée évoque également le concept d’un nom de famille qui complète celui du prénom, et qui a plus d’importance dans le signe pour les raisons expliquées ci-dessus, les signes ne sont conceptuellement similaires qu’à un faible degré sur le plan conceptuel.
Pour le public qui perçoit les deux prénoms comme étant différents, le seul fait que ceux-ci se ressemblent ne suffit pas à établir une similitude conceptuelle, ainsi pour cette partie du public, les signes ne sont pas conceptuellement similaires, compte du fait qu’ils évoquent des concepts différents (un prénom et un autre prénom suivi d’un nom de famille). La même conclusion concerne le public qui ne perçoit de concept que dans lar marque contestéet.
Les signes en présence sont similaires dans la mesure où l’élément « HARLIE » du signe contesté est similaire à la marque antérieure.
- Renommée de la marque antérieure
Aux dires de l’opposante, la marque antérieure « HARLEY » est renommée dans l’Union européenne et dans chacun des états-membres de l’Union européenne.
La renommée implique un seuil de connaissance qui n’est atteint que lorsque la marque antérieure est connue d’une partie significative du public concerné par les produits ou services qu’elle désigne. Le public au sein duquel la marque antérieure doit avoir acquis une renommée est celui concerné par cette marque, c’est-à-dire selon le produit ou service commercialisé, le grand public ou un public plus spécialisé.
Dans le cas présent, l’Union européenne a été désignée par l’enregistrement international contesté le 07/01/2015. Toutefois, la marque contestée a pour date de priorité le 08/08/2014. Par conséquent, l’opposante a été invitée à apporter la preuve que la marque antérieure a acquis une renommée dans l’Union européenne avant cette date. Par ailleurs, les preuves doivent établir que la renommée a été acquise pour les produits par rapport auxquels la renommée a été invoquée par l’opposante, à savoir :
Classe 9 : Lunettes; lunettes de soleil; lunettes (en plastique); casques de protection; pièces et indicateurs électriques pour motocyclettes, à savoir tachymètres, compteurs de tours, batteries, câblage, régulateurs de vitesse, commutateurs, bougies, contacts de rupture, pièces d'allumage, radios, clignotants, raccords terminaux, interrupteurs de circuit, thermostats, chargeurs de batteries, armatures, régulateurs de voltage; bandes vidéo et vidéodisques préenregistrés et vierges, magnétoscopes et lecteurs de bandes vidéo, rebobineurs de bandes vidéo, postes de télévision, équipement stéréo, cassettes et disques audio préenregistrés et vierges, juke boxes, enregistreurs et lecteurs audio, haut-parleurs, lecteurs de disques, récepteurs, logiciels enregistrés, appareils automatiques à prépaiement, flippers et amplificateurs.
Classe 12 : Appareils de locomotion par terre, par air, par eau, rails et leurs pièces non compris dans d'autres classes; indicateurs de direction et claxons.
Classe 14 : Médaillons non en métaux précieux.
Classe 25 : Vêtements d'extérieur, chandails, bretelles, foulards, bandanas, mouchoirs, vestes, manteaux, gilets, gants, jeans, chaps, chemises, shorts, casquettes, chapeaux, chapellerie, chapeaux tricotés, chapeaux de pluie, ceintures, bandeaux pour les poignets, surtouts, bonneterie, cols-bretelles, cravates, robes de nuit, chemises de nuit; pyjamas, pantalons, vêtements de pluie, manteaux de pluie, chemises, sweat-shirts, pantalons de training, débardeurs, t-shirts, sous-vêtements, costumes, bandeaux, collants, tabliers, mitaines, lingerie, vêtements en cuir, maillots de bain, jupes, bavoirs; chaussures, à savoir chaussures et bottes, et pièces de chaussures, à savoir bouts de chaussures, patins, protections pour talons.
Classe 26 : Décorations pour les cheveux et les vêtements non en métaux précieux, boucles de ceintures non en métaux précieux, broderies, boutons, fermetures à glissières, épingles autres qu'articles de bijouterie; insignes, lanières décoratives.
En date du 16/12/2015, l’opposante s’est vu accorder un délai de deux mois à compter de la fin du délai de réflexion pour produire la preuve requise et la traduction correspondante. Ce délai a été prolongé jusqu’au 21/06/2016.
Dans le délai indiqué, l’opposante a fourni ses observations, une déclaration et des éléments de preuve en anglais annexés à la déclaration, ainsi qu’une traduction des observations et de la déclaration en français. Les annexes à la déclaration n’ont pas été traduites et ne sont ainsi disponibles qu’en anglais.
La langue de procédure choisie par l’opposante dans le cas d’espèce est le français.
Ainsi que précédemment indiqué, la charge de la preuve à l’appui de la marque antérieure, y compris de sa renommée, incombe à l’opposante et l’Office ne prend pas en considération les observations écrites ou documents ou parties de ceux-ci qui ne sont pas présentés ou qui ne sont pas traduits dans la langue de procédure.
Ainsi, si les preuves de la renommée ne sont pas rédigées dans la langue correcte, elles doivent être traduites dans la langue de la procédure au cours du même délai de quatre mois, comme l’exigent les règles 19, paragraphes 3 et 4, du REMUE. Toutefois, compte tenu du volume de documents souvent nécessaire pour prouver la renommée, il suffit de traduire uniquement les parties importantes des publications ou des documents longs. De même, il n’est pas nécessaire de traduire intégralement les documents ou parties de documents qui contiennent principalement des chiffres ou des statistiques dont la signification est évidente, comme c’est souvent le cas pour les tableaux, factures, les bons de commande, les diagrammes, brochures, catalogues, etc.
En l’espèce, une grande partie des documents apportés en anglais comprennent de longs textes (par exemple les articles de presse, différents manuels, les explications sur les méthodologies utilisées pour les classements fournis, etc.). Ces documents n’ont pas été traduits, ne serait-ce que partiellement. Cependant, il convient de tenir compte que la déclaration traduite en français comporte une liste de ces preuves avec pour chacune d’elles un descriptif assez précis. La division d’opposition évaluera donc pour chacun des éléments fournis ce qui peut être ou non pris en compte en fonction de leur caractère explicite et du descriptif fourni.
L’opposante a fourni des preuves à l’appui de son moyen le 21/06/2016. Comme l’opposante a sollicité de garder confidentielles vis-à-vis des tiers certains des éléments de preuve, la division d’opposition ne décrira ceux-ci qu’en des termes généraux sans divulguer de telles informations. Les preuves consistent dans les documents suivants :
- Déclaration de Mme Linda Heban, vice-présidente et principale conseillère juridique en charge des marques de l’entreprise opposante. Elle indique que cette dernière est une des sociétés du groupe Harley-Davidson qui forment ensemble l’Organisme Harley-Davidson, et se charge à l’échelle mondiale de l’enregistrement et de la tenue des marques de commerces de l’Organisme. Elle ajoute que l’Organisme conçoit, fabrique et vend/fournit, entre autres, des motos, des pièces, accessoires et équipements pour motos, des services et d’autres produits s’y rapportant incluant notamment des motos de course et des vêtements pour motos. Elle affirme que la popularité de la marque va au-delà de ces domaines et que nombre de clients achètent les produits pour montrer qu’ils s’associent à l’aventure et aux valeurs de la marque Harley-Davidson, incluant la liberté et l’individualité. Elle explique que la création de l’Organisme remonte à 1903 de sorte qu’il a fêté son 110ème anniversaire en 2013, ces festivités ayant duré un an, dans 11 pays et six continents et ayant accueilli un très grand nombre de personnes. Elle affirme que le public concerné qui connait l’Organisme Harley-Davidson utilise fréquemment le nom « Harley » pour le désigner de manière abrégée. De fait, elle soutient que la marque « Harley-Davidson » et la marque « Harley » sont synonymes et interchangeables. Mme Heban souligne la réussite commerciale de l’Organisme Harley-Davidson à l’échelle mondiale, les ventes entre 2008 et 2014 se chiffrant en milliards de dollars américains (un tableau est fourni dans l’annexe, les produits n’étant pas spécifiés), ainsi que sa présence sur tous les réseaux sociaux. Il ressort également de la déclaration que la marque est apparue dans des films, des chansons et à la télévision. Sont notamment cités les films « Easy Rider » (1969), «The Rocky Horror Picture Show » (1975), « Captain America » (2014). Il est ajouté que la marque figure dans le titre d’un film à savoir « Harley-Davison and the Marlboro Man » (1991) avec les acteurs Mickey Rourke et Don Johnson. Selon la déclaration, la gamme des produits et services « Harley-Davidson » inclut des produits cosmétiques, des appareils sonores et des vêtements et ceci peut se vérifier sur le site internet www.harley-davidson.com. A cet égard, il est souligné que dans les années 1930, les clubs « Harley-Davidson » ont commencé à être très populaires et que les vêtements de la marque ont commencé à être utilisés par volonté de représenter physiquement l’appartenance à ces clubs. Cette volonté d’identification à la marque se traduit par un engouement pour des accessoires divers portant la marque. Un article du journal « LA TIMES » de décembre 1993 est cité: « Harley a inspiré, au cours de cette année, une tendance internationale dans les vêtements pour motocyclistes. L’image du motocycliste s’est tellement immiscée dans le secteur de la mode que le « ‘Council of Fashion Designer of America’ remettra une récompense spéciale à ‘Harley-Davidson’, à l’occasion d’un gala qui se tiendra à New York ». Mme Heban indique que les consommateurs de l’Union européenne peuvent acheter de nouveaux produits et/ou services « Harley-Davidson » auprès de concessionnaires ou dans des points tiers de vente au détail. De plus les produits sous licence sont vendus à l’occasion de rallyes et événements Harley-Davidson. Un tableau dans la déclaration indique le nombre de concessionnaires dans des pays de l’Union européenne en octobre 2013/mai 2016, par exemple : France (62/53) ; Royaume-Uni (30/27) ; Italie (44/42). Il est fait mention de la participation de l’Organisme à un programme de formation pour les organes douaniers et de répression des fraudes en 2015, auxquels ont participé environ 650 personnes de l’Union européenne. Le document souligne l’attention portée au respect des normes d’utilisation de la marque dans le but de permettre aux consommateurs de vérifier qu’ils achètent un produit authentique, ainsi que le souci de contrôler la qualité des produits. De ce point de vue, les licenciés sont soumis à des contrats de licence stricts. La déclaration mentionne un organisme désigné « Harley Owners Group » (HOG) organisé en sections locales, organisation de fans de motos qui compterait plus d’un millions de membres et organisant chaque année des dizaines d’événements. Les sections sont soumises à des règles, la première a vu le jour en mars 1984 à Denver dans le Colorado, d’autres ont été créées en France et en Suède dès 1992 et en République tchèque, en Grèce, aux Pays-Bas, en Pologne et en Espagne dès 1993. La déclaration contient un tableau de dépenses promotionnelles dans le monde, ainsi que spécifiquement au Royaume-Uni et en Irlande, entre 2008 et 2011, indiquant des montants supérieurs au million de livres sterling. Elle fait référence à des événements populaires organisés en Europe notamment au « European Bike Week », rallye en Autriche, auquel auraient assisté près de 100 000 personnes en septembre 2014.
Les pièces suivantes sont annexées à la déclaration :
- Annexe LH1 : Classement Brandpower 2012 de la société CoreBrand (Mme Heban indique qu’il s’agit d’une société spécialisée en marques) dans lequel la marque « Harley-Davidson » est classée troisième. Le document en question est en anglais, il est aisé de repérer la marque dans le classement, ainsi que la date et le nom de la société CoreBrand. Le domaine indiqué est « Hotel & Entertainment ». Le document comporte un très long texte en anglais qui ne peut être pris en considération. Sur la base des éléments explicites, il n’est pas possible de déterminer la nature et la portée d’un tel classement, notamment son éventuel impact dans l’Union européenne ou même s’il présente un quelconque rapport avec l’Union européenne.
- Annexe LH2 : Classement (Top 100) Interbrand de 2012 dans laquelle la marque « Harley-Davidson » apparait à la 87ème position et estimant la valeur de cette dernière à 4 772 millions de dollars. L’opposante fournit des traductions partielles du texte accompagnant le classement en vue de prouver que le nom « Harley » est utilisé de manière interchangeable avec « Harley-Davidson » (« fans de Harley », « Harleys totalement uniques ». Le domaine indiqué est « automotive »).
- Annexe LH3 : Classement Best Global Brands 2015 (Top 100) d’Interbrand, citant la marque « Harley-Davidson » en 79ème position et estimant sa valeur à 5460 millions de dollars américains. L’article correspondant à la marque est fourni en anglais et une phrase est traduite en français : «Toute personne peut assouvir son désir de liberté personnelle sur une Harley ».
- Annexe LH4 : Extrait d’un exemplaire du magazine « Forbes » du 07/01/2002 .La table des matières montre la marque Harley-Davidson, les pages intérieures montrent des photographies de motos désignées « Harley ». L’article est en anglais et son contenu ne peut pas être pris en compte.
- Annexe LH5 : Extraits des pages « Linkedin », « FaceBook », « Twitter » de l’opposante, montrant plus de 50 000 abonnés sur Linkedin en juillet 2015, presque 7 millions de « j’aime » sur la page Facebook (173 952 sur la page UK), et approximativement 278 000 abonnés sur Twitter. Les documents incluent de très nombreuses photographies de motos. Les documents incluent les expressions « Harley-Davidson » et « Harley ». Le texte est en anglais et n’est pas de nature explicite, ainsi il ne peut pas être pris en compte.
- Annexe confidentielle A : Il s’agit de données indiquant le nombre total de « j’aime » reçus par rapport à des messages publiés sur « Facebook », et le nombre d’utilisateurs actifs, classés par mois de l’année 2015 et par pays de l’Union européenne. La source du document n’est pas indiquée, il s’agit d’un tableau sur une page blanche. Les « j’aime » se chiffrent en centaines de milliers.
- Annexe LH6 : Document intitulé « Gallery : the 25 Most Iconic Movie Harleys » que la division d’opposition juge explicite s’il est lu en combinaison avec le descriptif de Mme Heban. Il consiste en une série de pages, dont l’origine n’est pas spécifiée ni identifiable, chacune comportant un titre de film et une photographie de moto. Les commentaires mentionnent des motos « HARLEY » ou « HARLEY-DAVIDSON ».
- Annexe LH7 : Article du journal « The Guardian », en anglais, daté de février 2012 incluant une photographie de Georges Bush (fils) sur une moto. Le terme « Harley-Davidson » est facilement repérable dans le titre et dans la légende de la photo.
- Annexe LH8 : Décision rendue par le Tribunal de commerce n°2 de Palma de Mallorca dans l’affaire du procès ordinaire n° 419/08 estimant que les marques Harley et Harley-Davidson jouissent d’une reconnaissance internationale et sont immédiatement reconnues par le consommateur moyen. L’opposante a traduit un extrait facilement repérable sur la page 4 indiquant que « la renommée et la gloire des marques de commerce HARLEY ou HARLEY DAVIDSON sont incontestables grâce â une renommée découlant de la portée du motocyclisme et sont immédiatement reconnues par le consommateur moyen ».
- Annexe confidentielle B : Tableau dont la source n’est pas indiquée, indiquant les revenus dégagés par les ventes de motos dans l’Union européenne de 2008 à 2012 ainsi la quantité de motos concernées. Dans certains pays, notamment le Royaume-Uni, ces chiffres sont très élevés.
- Annexe LH9 : Selon Mme Heban, captures d’écran du site internet datées du 03/10/2013 en vue de démontrer l’utilisation des marques « Harley-Davidson » et « Harley » sur des motos mais aussi des vêtements, des casques, des gants et des accessoires. Ni l’adresse du site ni la date ne sont visibles sur les photos en question qui de surcroît ne permettent pas de distinguer la marque sur les produits. Ces produits sont essentiellement des motos, ainsi que, sur une page, un casque et des gants.
- Annexe confidentielle C : Tableau dont la source n’est pas identifiée, indiquant les revenus dégagés par les ventes dans toute l’Union européenne de pièces détachées et d’accessoires de motos entre 2008 et 2013. Il s’agit de chiffres élevés.
- Annexe LH10 : Extrait du site internet www.harley-davidson.eu présentant une frise chronologique succincte relative à la production de vêtements « Harley- Davidson » : (pulls (jerseys) en 1912 ; gilets, jambières et gants en 1914, vêtements fonctionnels en 1915, première veste en cuir en 1928 ; premières chemises en 1936.)
- Annexe confidentielle D : Tableau de nature interne indiquant les revenus provenant des ventes en gros de vêtements dégagées par l’Organisme Harley-Davidson dans toute l’Union européenne entre 2008 et 2012. Les chiffres sont élevés.
- Annexe confidentielle E : Copie d’un document daté de 2012 identifié par Mme Heban comme étant un « Guide sur la protection de la marque de commerce utilisé de 2005 à 2014 » contenant une liste de marques « Harley-Davidson » y compris les marques verbales « Harley-Davidson » et « Harley ». Le texte est intégralement en anglais et ne peut être pris en compte. Le document inclut de nombreuses photographies de produits : vêtements (gants, casquettes, jeans, ceintures, blousons, chaussures, sacs, pendentifs, motos miniatures (jouets), montres, boites à cigarettes, briquets).
- Annexe confidentielle F : Selon le descriptif copie du « Guide sur le produit sous licence » de l’Organisme, intégralement en anglais et non daté. Il comporte des photographies de motos et pièces de motos.
- Annexe LH11 : Captures d’écran du site internet de l’opposante datées de 2016 montrant divers produits (vêtements, tasses, casquettes) portant la marque « Harley-Davidson ».
- Annexe LH12 : Copie du catalogue « MOTORCLOTHES » de 2004 et extraits des catalogues 2004, 2006 et 2008. Les prix sont indiqués en dollars américains mais Mme Heban indique dans la déclaration que les produits sont vendus dans l’Union européenne (étant indiqué que des catalogues similaires sont publiés chaque année). Il s’agit de vêtements et d’accessoires (casques, tasses, pins, bonnets, bandanas, casquettes, ceintures, briquets, sacs et sacoches, porte-clefs, verrres, horloges, ouvre-bouteilles, tirelires, produits pour le maintien du cuir, lunettes, cadre-photos).
- Annexe LH13 : Copie du catalogue de 1915 des accessoires pour motos montrant des pièces détachées, des accessoires et des vêtements.
- Annexe LH14 : Extraits des catalogues 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014 de pièces détachées et accessoires. Il est souligné dans les observations que les accessoires incluent des produits pour l’entretien du cuir et des produits de nettoyage, et que les pièces électriques incluent des radios, des équipements stéréo et des amplificateurs.
- Annexe LH15 : Tableaux des chiffres de ventes en relation avec les pièces détachées et les accessoires dans différents pays de l’Union européenne pour les années 2009 à 2014 (source non identifiée). Les produits ne sont pas détaillés, le tableau de comporte pas de titre permettant d’identifier à quoi se rapportent les chiffres, cet aspect n’étant expliqué que dans le descriptif de la déclaration.
- Annexe LH16 : Factures datées de 2009 à 2014 émises par « Harley-Davidson Europe Limited » et d’autres sociétés membres de l’Organisme, concernant selon la déclaration, des pièces détachées, équipements et accessoires de motos dans l’Union européenne (en faveur de concessionnaires agréés par l’opposante). Les factures sont en anglais et les désignations de produits ne sont pas traduites. Elles ne sont pas non plus explicites. Ces documents ont ainsi une faible valeur probante.
- Annexe LH17 : Captures d’écran du site internet de l’opposante datées de 2016 montrant des accessoires tel que des produits de nettoyage et polissage, radios, équipements, stéréos et amplificateurs.
- Annexe LH18 : Captures d’écran datées de 2015 du site internet www.harley-davidson.com/en-GB/Motorcycles/motorcycles.html et http://accessories.harley.davidson.eu. Elles montrent des motos et leurs accessoires et pièces.
- Annexe LH19 : Captures d’écran datées de Mai 2014 comportant, notamment, une carte du Royaume-Uni situant l’emplacement de distributeurs Harley-Davidson (dans plusieurs villes notamment Leeds, Manchester, Liverpool) ainsi qu’en Belgique et en France.
- Annexe LH20 : Captures d’écrans datées 2010-2012, obtenues à partir du site internet www.archive.org.
- Annexe confidentielle G : Tableaux et graphiques indiquant les visites sur le site internet de l’opposante en septembre 2013 indiquant des dizaines de milliers de visites provenant du Royaume-Uni.
- Annexe LH21 : Copies des « Consignes sur l’Identité de la Société et la Publicité européenne » datées de 2003 et 2015, intégralement en anglais. Mme Heban indique qu’il s’agit des consignes qu’elle utilise pour vérifier que les concessionnaires respectent les normes fixées.
- Annexe LH22 : Exemples de publicités diffusées par des concessionnaires « Harley-Davidson » entre 2006 et 2012, dans diverses publications au Royaume-Uni (y compris publications en ligne) incluant « Motorcycle News », « Bike Trader », « Telegraph Motoring », « Visor Down », « Classic Bike », « Motorcycle & Sport Leisure », « GQ », « Men’s Health », « CSMA Magazine », « Sunday Times ». Les publicités en question sont pour des motos. Les marques « Harley-Davidson » et « Harley » sont visibles. Le nom de la publication n’est identifiable que par une légende au-dessous des photos suggérant que les documents sont des échantillons disponibles dans des fichiers internes et non les documents publiés.
- Annexe LH23 : Extraits des magazines HOG publiés en 2007 et 2013 contenant des publicités pour des vêtements de protection et de mode ainsi que des chaussures et des lunettes de mode (sur ces dernières la marque « Harley-Davidson »/ « Harley » n’est pas visible mais la marque « Wiley X »). Une carte du Royaume Uni permet de localiser d’assez nombreux distributeurs.
- Annexe LH24 : Captures d’écran du site internet http://www.hogeuropgallery.com/ebw concernant la promotion du rallye « European Bike Week » en Autriche (3-5 Septembre 2013) fournies en plusieurs langues dont le français.
- Annexe LH25 et LH26: Captures d’écran du site internet de l’opposante relatives à des événements « Harley-Davidson » en 2014 et 2013 (en Croatie, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Irlande, en Finlande, en France, en Espagne, etc.) indiquant notamment la participation de dizaines de milliers de motards. Les expressions « Harley-Davidson »et « Harley » sont utilisées indistinctement (« Hamburg Harley Days »). Les documents indiquent notamment que 13 000 personnes ont participé au 30ème anniversaire du HOG à Saint-Tropez du 2 au 5 mai 2013, et que 30 000 personnes ont pris part à l’Ireland Bike du 31 mai au 3 juin 2013.
- Annexes 27-28-29-30 : Documents censés être relatifs à des événements en 2012 et 2013 (« Eurofestival » de St Tropez en mai 2012, « Ireland Bike Festival » en mai/juin 2013, 21ème rallye européen du HOG à Cascais, Portugal, « Barcelona Harley Days » en juillet 2012). Les documents fournis sont des photographies qui ne permettent d’identifier ni le lieu ni l’événement à l’exception de ceux concernant le festival en Irlande.
- Annexe LH31 : Selon le descriptif dans la déclaration, document relatif à la couverture médiatique du 110ème anniversaire de « Harley-Davidson » à Rome au cours duquel le pape aurait béni les motocyclistes sur la Place St-Pierre. Le document est en anglais et l’image de la vidéo disponible sur le site « youtube » montre un écran noir.
- Exhibit LH32 : Documents censés concerner la mise aux enchères de la moto utilisée par le pape après l’événement susmentionné, en anglais. Est fourni un article du journal « The Independent » et un autre du « Guardian » datés du 08/04/2015 comportant une photographie montrant le pape et un titre faisant référence à une moto « Harley-Davidson ».
- Exhibit LH33 : Exemples d’articles dans la presse européenne, tous en anglais. Le contenu ne peut pas être pris en compte mais les photographies de motos et les titres faisant référence à « Harley » ou « Harley-Davidson » sont éloquents. (« Motorcycle News » 11/05/2005 et 04/04/2007 ; « Financial Times » 08/09/2007 « GQ » Août 2008, « Motorcycle » Octobre 2008, « Ride spring » 2008, « Daily Star week-end end » Octobre 2009, « Fastbikemag » Février 2009, « Daily Star week-end » Août 2010, « FHM Mai 2010 », « The Sun » (mentionnant « Harley » tout court) février 2010, « Ride » mai 2003, « MCN supplement » novembre 2011 relatif au centenaire de Harley (« Harley Centenary» « 100 years of Harley-Davidson »).
- Annexe LH34 : Extrait d’un sondage CoolBrands 2011/2012 montrant un classement « Top 20 » concernant le Royaume-Uni dans lequel la marque « Harley-Davidson » est 3ème dans le classement général et 1ère dans la catégorie « Automotive-Motorbikes ». La méthodologie employée est décrite en anglais, la nature du sondage n’est pas vérifiable. La valeur probante de ce document est quasiment nulle en l’absence de plus amples informations.
- Annexe LH35 : Document intégralement en anglais ne pouvant être pris en compte.
- Annexe LH36 : Page extraite du magazine « GP » de mars 2010 montrant notamment une photographie de moto sous le titre « Best retro ride The Harley-Davidson crossbones » et photographies de trophées divers correspondant à des premiers prix « MCN » (« Motorcycles news ») en 1998, 1999, 2000, 2001, 2002, 2003, 2008.
Afin de déterminer le niveau de renommée de la marque, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, ainsi que l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir.
En ce qui concerne la déclaration, l’article 78, paragraphe 1, point f), du RMUE cite des moyens de preuve, parmi lesquels figurent «les déclarations écrites faites sous serment ou solennellement ou qui ont un effet équivalent d’après la législation de l’État dans lequel elles sont faites». Pour ce qui est de la valeur probante de ce type d’éléments, l’on accorde généralement moins de poids aux déclarations établies par les parties intéressées elles-mêmes ou par leurs employés, qu’à des éléments de preuve indépendants. En effet, la perception de la partie impliquée dans le litige risque d’être plus ou moins faussée en raison de ses intérêts personnels dans l’affaire. Ceci ne veut pas dire pour autant que ces déclarations sont dépourvues de toute valeur probante. Le résultat final dépend toutefois de l’appréciation globale des éléments de preuve fournis dans le cas d’espèce; il en va ainsi parce que des pièces supplémentaires sont en général nécessaires pour apporter la preuve de l’usage, puisqu’il y a lieu de considérer que ces déclarations ont une valeur probante inférieure à celle des preuves provenant de sources indépendantes.
Il ressort de la liste que le dossier fourni est assez volumineux. Cependant, ainsi qu’indiqué ci-dessus, toutes les preuves ne peuvent pas être prises en compte ou pour le moins, pas intégralement lorsqu’elles comportent de longs textes exclusivement en anglais, qui n’est pas la langue de procédure, ou lorsque leur contenu n’est pas explicite malgré le descriptif fourni dans la déclaration. C’est le cas par exemple des factures de l’annexe LH16, sur lesquelles les dates et montants sont explicites mais qui ne permettent pas d’identifier les produits correspondants.
Au vu des preuves apportées, la division d’opposition considère que la renommée n’est, de manière évidente, pas démontrée pour des produits pour lesquels la marque antérieure est enregistrée dans les classes 9, 14, 25 et 26. Les éléments de preuve concernant ces produits sont essentiellement des catalogues et des captures d’écran du site internet de l’opposante qui ne fournissent aucune indication sur un éventuel niveau de reconnaissance de la marque antérieure pour de tels produits ni même sur un usage effectif sur le marché. L’accès des consommateurs de l’Union européen à de tels documents n’est de plus pas démontré. Les chiffres de vente de vêtements (annexe confidentielle D) consistent en des tableaux de nature interne et ne sont pas corroborés par des éléments objectifs. L’usage de longue date de la marque pour des vêtements que suggère la frise chronologique (annexe LH10) ne saurait automatiquement indiquer une renommée. Les différentes consignes que l’Organisme impose à ses concessionnaires pour le marketing de tels produits ne sont pas non plus nécessairement indicateurs d’une renommée mais simplement d’une stratégie commerciale de la part de l’opposante dont l’impact sur le public ne peut pas être évalué sur la base des preuves fournies. La décision d’un tribunal de Mallorca ne permet pas d’évaluer les critères sur lesquels la renommée des marques antérieures « HARLEY » et « HARLEY-DAVIDSON » a été établie.
Les éléments relatifs à des pièces et accessoires d’appareils de locomotion relevant de la classe 12 ne sont pas davantage concluants. D’assez nombreuses preuves concernent des accessoires et équipements pour motos mais il s’agit du même type de documents que ci-dessus, à savoir des catalogues, captures d’écrans et tableaux non officiels. Ainsi qu’indiqué plus haut, les factures relatives aux ventes de tels produits ne sont pas traduites et il n’est pas possible d’identifier le type d’équipement concerné.
Dans ces conditions, la division d’opposition conclut que l’opposante n’a pas démontré que sa marque est renommée pour les produits susmentionnés.
En ce qui concerne les appareils de locomotion, il est évident que la question de la renommée ne se pose que pour des motos qui sont les seuls véhicules mentionnés dans les preuves.
A cet égard, la division d’opposition juge indispensable de rappeler que la charge de la preuve incombe à l’opposante. Aux termes de la deuxième partie de l’article 76, paragraphe 1, du RMUE, dans les procédures inter partes, l’examen de l’Office est «limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties». Il s’ensuit que, pour apprécier si la marque antérieure jouit d’une renommée, l’Office ne peut pas tenir compte de faits dont il est informé de par sa connaissance personnelle du marché ni procéder à un examen d’office du dossier, mais que ses conclusions doivent être exclusivement fondées sur les informations et les pièces produites par l’opposante. Des exceptions à cette règle sont possibles lorsque certains faits particuliers sont si bien établis qu’ils peuvent être considérés comme étant universellement connus et que, partant, l’Office est également censé les connaître (par exemple, le fait qu’un pays donné possède un certain nombre de consommateurs, ou que les produits alimentaires sont destinés au grand public). Toutefois, la question de savoir si une marque a ou non franchi le seuil de renommée fixé par la Cour dans l’affaire General Motors n’est pas, en soi, une pure question de fait, puisqu’elle suppose l’évaluation juridique de plusieurs indications factuelles et que l’on ne saurait simplement présumer que la renommée de la marque antérieure constitue, en tant que telle, un fait universellement connu.
En l’espèce, il est évident sur la base des preuves que la production de motos est l’activité principale que développe l’opposante en relation avec la marque antérieure. Pour ces produits, l’opposante a certes fourni des documents du même type que pour les produits précédents (tableaux de nature interne relatifs aux ventes de motos dans l’Union européenne, captures d’écrans et catalogues) mais également des documents plus probants en ce qui concerne la reconnaissance de la marque par le public. Il s’agit par exemple des documents relatifs aux nombreuses manifestations autour de la marque organisées dans plusieurs pays de l’Union européenne (rallyes divers, événement du centenaire), qui ont indéniablement rencontré un certain succès et fait l’objet d’une certaine couverture médiatique, à des dates proches de la date pertinente. Des publicités concernant la marque (et relatives à des motos) publiées dans des journaux au Royaume-Uni entre 2006 et 2012 ont également été apportées. Certains des classements fournis (LH1-LH4) ont une valeur probante très limitée voire nulle compte tenu du fait que l’absence d’une traduction ne permet pas d’évaluer leur signification exacte. Il n’est pas possible de déterminer à quoi ils correspondent exactement et si le public de l’Union européenne a participé aux procédures menant à ces classements ou est susceptible d’en avoir eu connaissance. Toutefois, les classements de l’annexe LH34 sont plus probants en ce qu’ils mentionnent spécifiquement le Royaume-Uni. De surcroît, l’opposante a fourni des documents prouvant la présence de la marque sur les réseaux sociaux et des photographies impliquant des personnes très connues. Il est également probable que la marque est apparue dans des films même si les documents apportés à cet égard, de nature interne, et ne montrant pas la marque, ne sont pas réellement objectifs. Enfin, les éléments relatifs à l’existence de nombreux autres produits portant les marques « Harley » ou « Harley-Davidson », s’ils ne suffisent pas pour montrer une renommée pour ces produits, peuvent être interprétés comme démontrant que le succès de la marque en relation avec l’activité principale de production de motos, a conduit l’opposante à la décliner pour d’autres produits dans le cadre d’une démarche de marketing.
Compte tenu de ce qui précède, la division d’opposition conclut que les documents fournis, sans apporter la preuve d’une renommée exceptionnelle, suffisent toutefois à établir que la marque antérieure « HARLEY » occupe une position reconnue sur le marché des motos dans l’Union européenne.
A cet égard, la division d’opposition a considéré convaincants les arguments de l’opposante visant à démontrer que les expressions « HARLEY » et « HARLEY-DAVIDSON » sont interchangeables. Dans ces circonstances, la division d’opposition constate que, considérées globalement, les preuves produites par l’opposante montrent que la marque antérieure nº 83 931 « HARLEY » jouit d’une renommée en relation avec des motos dans l’Union européenne, notamment au Royaume-Uni.
Comme indiqué plus haut, la renommée de la marque antérieure est une condition nécessaire pour que l’opposition soit accueillie au titre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE. Étant donné que la renommée n’est établie que pour des motos, l’examen de l’opposition dans le cadre de l’Article 8, paragraphe 5, du RMUE ne se poursuit que sur la base de ces produits.
- Le «lien» entre les signes
Comme indiqué ci-dessus, la marque antérieure jouit d'une renommée et les signes sont similaires. Afin d'établir l’existence d’un risque de préjudice, il est nécessaire de démontrer que, compte tenu de tous les facteurs pertinents, le public concerné établira un lien (ou une association) entre les signes. La nécessité d'un tel «lien» entre les marques en conflit dans l'esprit des consommateurs n'est pas explicitement prévue par l'article 8(5) RMUE mais elle a été confirmée par l’arrêt du 23/10/2003, C-408/01, Adidas, EU:C:2003:582, § 29 et 31 et par l’arrêt du 27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 66. Il ne s’agit pas d’une exigence supplémentaire: ceci reflète simplement la nécessité de déterminer si l'association que le public pourrait établir entre les signes est telle qu'il est vraisemblable que l'usage de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu'il lui porte préjudice, après avoir apprécié tous les facteurs pertinents dans le cas d'espèce.
Parmi les critères pertinents aux fins d'apprécier s'il existe un «lien», peuvent être cités (27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 42):
∙ le degré de similitude entre les signes ;
∙ la nature des produits et des services, y compris le degré de similitude ou de dissemblance de ces produits ou services ainsi que le public concerné ;
∙ l’intensité de la renommée de la marque antérieure ;
∙ le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure ;
∙ l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public.
Cette liste n'est pas exhaustive et d'autres critères peuvent être pertinents en fonction des circonstances de l'espèce. De plus, l'existence d'un «lien» peut être établie sur la base de certains de ces critères seulement.
En l’espèce, les signes présentent des similitudes, un peu plus marquées pour le public anglophone et la marque antérieure, dont le caractère distinctif intrinsèque est normal, est renommée dans l’Union européenne, notamment au Royaume-Uni, pour des motos.
Les produits contestés sont les suivants :
Classe 3 : Baumes après-rasage; émulsions après-rasage; gels après-rasage; eaux de Cologne après-rasage; préparations avant et après-rasage; préparations après-rasage; crèmes à raser; crèmes à raser; lotions après-rasage; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux; produits de parfumerie, produits odorants et encens; menthe pour la parfumerie; produits de parfumerie synthétiques; produits odorants et produits de parfumerie; extraits de fleurs (parfumerie); savons antibactériens pour la peau; savons antibactériens; savons d'avivage; savons de bain; savons pour le bain sous forme liquide, solide ou de gel; savons-crèmes; savons désinfectants parfumés; savons désinfectants; savons désodorisants; savons liquides pour le bain; savons liquides pour les mains et le visage; savons liquides; savons liquides pour bains de pieds; savons pour le visage; savons granuleux; savons pour les mains; savons pour le corps; savons cosmétiques; savons médicinaux; savons parfumés; savons luffas; savons industriels; savons à usage domestique; déodorants pour soins corporels; produits rafraîchissants pour la peau à usage cosmétique; crèmes après-soleil (à usage cosmétique); préparations d'aloe vera à usage cosmétique; aromates pour boissons (huiles essentielles); produits pour rafraîchir l'haleine autres qu'à usage médical; huiles essentielles en tant que produits odorants pour la lessive; huiles essentielles à usage personnel; huiles essentielles pour l'aromathérapie; sels et gels de bain et douche, autres qu'à usage médical; crèmes, huiles, lotions, sprays, crayons et baumes à usage cosmétique; émulsions, gels et lotions pour les soins de la peau; laits et lotions pour le visage (à usage cosmétique); savons liquides pour les mains, le visage et le corps; dentifrices; dentifrices liquides; dentifrices sous forme de chewing-gums; produits à polir pour instruments de musique.
Classe 15 : Basses (instruments de musique); cymbales; instruments de musique électriques et électroniques; étuis pour instruments de musique; instruments de musique; socles pour instruments de musique; cordes d'instruments de musique; chevalets pour instruments de musique; guitares acoustiques; basses (guitares); guitares électriques; guitares; sangles pour guitares; cordes de guitares; médiators pour guitares; diapasons; instruments à percussion; tambours et instruments à percussion; appareils pour accorder les instruments de musique.
Classe 25 : Vêtements; articles vestimentaires en lin; vêtements en soie; vêtements pour garçons; vêtements, chaussures, chapellerie; vêtements en cuir ou imitations de cuir; tenues pour les loisirs; articles vestimentaires tissés; vêtements pour hommes; ceintures en cuir (habillement); vêtements de dessus; cache-nez; sous-vêtements absorbant la transpiration; vêtements imperméabilisés; articles vestimentaires coupe-vent; chaussures; escarpins; souliers pour hommes; chaussures pour dames et pour hommes; articles chaussants pour l'athlétisme; chaussures de sport; souliers de sport; clous pour chaussures de sport; bandanas (foulards); habillement pour automobilistes; vêtements de sport; vestes de pêche; combinaisons humides pour le surf; combinaisons humides pour les sports nautiques de surface; chaussettes habillées pour hommes; bottes de motocyclisme; tenues de soirée; costumes; complets-veston; maillots de bain; maillots de bain pour dames; maillots de bain pour hommes; maillots de bain ajustés à balconnets; costumes trois pièces (habillement); chemises pour costumes; costumes pour hommes; tailleurs-pantalons; survêtements; costumes en cuir; combinaisons de pluie pour motocyclistes; chemises tissées; chemises de golf; chemises hawaïennes; chemises hawaïennes à boutonnage devant; chemises; chemises à col ouvert; chemisettes; chemises à manches longues; chemises habillées; débardeurs de sport; chemises de sport à manches courtes; maillots de sport anti-humidité; sous-vêtements pour hommes; caleçons longs en tant que sous-vêtements; shorties (sous-vêtements); sous-vêtements thermiques; sous-vêtements; cravates; lavallières; cravates-western (cordelières); blazers; ceintures de smoking; vestes d'intérieur; smokings; vestes de survêtement; vestes; vestes pour motocyclistes; cirés; vestes de sport.
Dans la classe 3, il s’agit de produits de beauté ou d’hygiène personnelle, de produits de parfumerie et de quelques produits de nettoyage spécifiques (de polissage pour les instruments de musique). Les produits de classe 15 sont des instruments de musique et leurs accessoires ou parties et ceux de la classe 25 sont des vêtements, chaussures et chapeaux.
Ces produits et les motos de l’opposante sont destinés au même public mais il existe d’importantes différences entre eux en ce qui concerne leurs natures, leurs circuits de distribution et leur origine commerciale ainsi que leur destination. Par ailleurs, il n’existe pas de lien de complémentarité ni de concurrence. Dans le cadre d’une comparaison sous l’article 8, paragraphe 1, du RMUE sur la base des critères susmentionnés, dits facteurs « Canon », les produits en cause sont ainsi dissimilaires.
Selon la division d’opposition, compte tenu de ces différences entre les produits, du degré de similitude peu significatif entre les signes (au mieux moyen sur le plan phonétique et faible sur le plan conceptuel, faible également sur le plan visuel) et de l’intensité modérée de la renommée de la marque antérieure (normale sans être exceptionnelle au vu des pièces au dossier), il n’existe aucun argument convaincant pouvant mener à penser que le public établira un lien entre le signe contesté, utilisé sur les produits de la classe 3 et de la classe 15, et la marque antérieure renommée pour des motos.
L’opposante fait référence dans ses observations au fait que dans le cas de marques jouissant d’une renommée exceptionnelle, le public est susceptible d’effectuer un rapprochement entre les marques en conflit même dans le cas de produits distincts. Or, dans le cas d’espèce, ainsi qu’indiqué plus haut, l’opposante n’a pas apporté la preuve d’une telle renommée exceptionnelle et l’argument n’est donc pas retenu.
En conséquence, eu égard à l’ensemble des facteurs pertinents du cas d'espèce et après appréciation de ces derniers, la division d'opposition conclut qu'il est improbable que le public concerné établisse une connexion mentale entre les signes en conflit, c'est-à-dire qu’il établisse un «lien» entre ceux-ci, lorsque la marque contestée est utilisée sur des produits des classes 3 et 15.
En ce qui concerne les produits dans la classe 25, les différences susmentionnées au niveau des produits existent également et il s’agit également de produits dissimilaires mais, au-delà des facteurs « Canon » de la comparaison, il convient de prendre en compte qu’il existe des vêtements spécifiques pour pratiquer la moto. De fait, la liste des produits contestés dans la classe 25 inclut de tels vêtements (combinaisons de pluie pour motocyclistes ; bottes de motocyclisme ; vestes pour motocyclistes).
Ainsi, même s’il n’apparait pas que la probabilité d’un lien dans l’esprit du public soit forte en raison de la similitude modérée des signes, qui n’est pas compensée par un degré important de renommée, la division d’opposition est d’avis qu’un tel lien ne saurait être exclu au regard des produits contestés de la classe 25 et qu’il convient à cet égard d’examiner si l’opposante a fourni des arguments convaincants à l’appui de la troisième condition nécessaire à l’application de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE, à savoir le risque d’un préjudice.
Par ailleurs, même si la majeure partie des produits contestés dans la classe 25 ne sont pas destinés à pratiquer le motocyclisme, voire sont destinés à pratiquer d’autres sports, la division d’opposition est d’avis qu’un lien peut être envisagé avec l’ensemble des produits de la classe 25 car la pratique de la moto va souvent de pair avec un style de vie qui se reflète notamment par l’adoption d’un style vestimentaire particulier également dans tous les aspects de la vie quotidienne. En tout état de cause, il serait artificiel de n’établir un lien que pour les articles contestés relevant du motocyclisme dans la mesure également des caractéristiques du marché en question à savoir le fait que les fabricants de vêtements ne se limitent habituellement pas à un type de vêtements en particulier. De plus, des vêtements qui ne sont pas destinés à des sports spécifiques sont néanmoins utilisés pour la pratique de tels sports, ou inversement des vêtements destinés en principe à un usage particulier sont utilisés pour d’autres usages ou dans la vie quotidienne. Enfin, les différents types de vêtements peuvent se trouver sur les mêmes points de vente.
En conséquence, eu égard à l’ensemble des facteurs pertinents du cas d'espèce et après appréciation de ces derniers, la division d'opposition conclut que l'opposition n'est pas bien fondée au sens de l'article 8, paragraphe 5, du RMUE, sur la base de la marque antérieure nº 83 931 pour les produits contestés dans les classes 3 et 15 et doit être rejetée.
En revanche, il n’est pas exclu que les consommateurs, lorsqu'ils rencontreront la marque demandée sur les produits contestés de la classe 25, puissent l’associer au au signe antérieur, c'est-à-dire établiront un «lien» mental entre les signes.
Il convient de rappeler que, bien qu'un «lien» entre les signes soit une condition nécessaire pour poursuivre l'appréciation du risque que l'usage de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu'il leur porte préjudice, l'existence d'un tel lien ne saurait toutefois suffire, à elle seule, à conclure à l’existence de l’un des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE (26/09/2012, T-301/09, Citigate, EU:T:2012:473, § 96).
- Risque de préjudice
L’usage de la marque contestée relève de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE lorsqu’une ou plusieurs des situations suivantes surviennent :
- la marque contestée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ;
- la marque contestée porte préjudice à la renommée de la marque antérieure
- la marque contestée porte préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure.
Bien que le préjudice ou le profit indu puisse n’être que potentiel dans une procédure d’opposition, une simple possibilité ne suffit pas pour que l’article 8, paragraphe 5, du RMUE s’applique. Alors que la titulaire de la marque antérieure n’est pas tenue de démontrer l’existence d’une atteinte effective et actuelle à sa marque, elle doit «apporter des éléments permettant de conclure prima facie à un risque futur non hypothétique de profit indu ou de préjudice» (06/07/2012, T-60/10, Royal Shakespeare, EU:T:2012:348, § 53).
Il s’ensuit que l’opposante doit établir que le préjudice ou le profit indu est probable en ce sens qu’il est prévisible dans des circonstances normales. À cet effet, l’opposante doit apporter des preuves ou, à tout le moins, avancer une argumentation cohérente montrant en quoi consisterait et comment surviendrait le préjudice ou le profit indu qui pourrait conduire à conclure prima facie qu’un tel événement est effectivement probable dans des circonstances normales.
Le risque de préjudice ou de profit indu doit être sérieux, en ce sens qu’il est prévisible (à savoir, pas uniquement hypothétique) en temps ordinaire. Dès lors, il ne suffit pas de démontrer simplement que le préjudice ou le profit indu ne saurait être exclu d’une façon générale, ou qu’il constitue un risque éloigné. Le titulaire de la marque antérieure doit produire des preuves prima facie d’un risque futur non hypothétique de profit indu ou de préjudice (arrêt du 06/06/2012, T-60/10, Royal Shakespeare, EU:T:2012:348, § 53). Comme expliqué ci-dessous, il ne suffit pas pour l’opposante de faire référence en des termes généraux à un profit indu ou à un préjudice porté au caractère distinctif ou à la renommée de ses marques antérieures sans soumettre de preuves convaincantes d’un préjudice réel ou d’arguments pertinents établissant un risque potentiel sérieux, pas seulement hypothétique, de préjudice.
En règle générale, des allégations d’ordre général (comme le simple fait de citer le libellé correspondant du RMUE) de préjudice ou de profit indu ne suffiront pas en elles-mêmes pour prouver le préjudice ou le profit indu potentiels: l’opposante doit produire des preuves et/ou développer une ligne d’argumentation convaincante afinde démontrer de manière spécifique comment, en tenant compte des deux marques, des produits et services en question et de toutes les circonstances pertinentes, le préjudice allégué pourrait exister.
En l’espèce, l’opposante allègue que les trois types de préjudice sont susceptibles de survenir, à savoir que l’usage de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, et porterait préjudice au caractère distinctif et à la renommée de la marque antérieure.
Les arguments invoqués sont présentés et examinés ci-après.
Avant d’examiner les arguments de l’opposante, il est utile de rappeler que l’examen qui suit porte sur l’opposition en ce qu’elle est dirigée contre les seuls produits de la classe 25, à savoir ceux pour lesquels un lien a été établi :
Classe 25 : Vêtements; articles vestimentaires en lin; vêtements en soie; vêtements pour garçons; vêtements, chaussures, chapellerie; vêtements en cuir ou imitations de cuir; tenues pour les loisirs; articles vestimentaires tissés; vêtements pour hommes; ceintures en cuir (habillement); vêtements de dessus; cache-nez; sous-vêtements absorbant la transpiration; vêtements imperméabilisés; articles vestimentaires coupe-vent; chaussures; escarpins; souliers pour hommes; chaussures pour dames et pour hommes; articles chaussants pour l'athlétisme; chaussures de sport; souliers de sport; clous pour chaussures de sport; bandanas (foulards); habillement pour automobilistes; vêtements de sport; vestes de pêche; combinaisons humides pour le surf; combinaisons humides pour les sports nautiques de surface; chaussettes habillées pour hommes; bottes de motocyclisme; tenues de soirée; costumes; complets-veston; maillots de bain; maillots de bain pour dames; maillots de bain pour hommes; maillots de bain ajustés à balconnets; costumes trois pièces (habillement); chemises pour costumes; costumes pour hommes; tailleurs-pantalons; survêtements; costumes en cuir; combinaisons de pluie pour motocyclistes; chemises tissées; chemises de golf; chemises hawaïennes; chemises hawaïennes à boutonnage devant; chemises; chemises à col ouvert; chemisettes; chemises à manches longues; chemises habillées; débardeurs de sport; chemises de sport à manches courtes; maillots de sport anti-humidité; sous-vêtements pour hommes; caleçons longs en tant que sous-vêtements; shorties (sous-vêtements); sous-vêtements thermiques; sous-vêtements; cravates; lavallières; cravates-western (cordelières); blazers; ceintures de smoking; vestes d'intérieur; smokings; vestes de survêtement; vestes; vestes pour motocyclistes; cirés; vestes de sport.
Comme indiqué plus haut, la marque antérieure a été considérée comme jouissant d’une renommée pour les produits suivants :
Classe 12 : Motos.
Préjudice porté au caractère distinctif (dilution)
Le préjudice porté au caractère distinctif de la marque antérieure, également désigné sous les termes de «dilution», de «grignotage» ou de «brouillage», est constitué dès lors que se trouve affaiblie l’aptitude de cette marque à identifier les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et utilisée comme provenant de la titulaire de ladite marque, l’usage de la marque postérieure entraînant une dispersion de l’identité de la marque antérieure (27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 29).
L’opposante fait référence à l’arrêt susmentionné à l’appui de son moyen, à savoir elle rappelle que:
- Plus la marque antérieure présente un caractère « unique » plus l’usage d’une marque postérieure identique ou similaire sera susceptible de porter préjudice à son caractère distinctif;
- L’usage d’une marque identique ou similaire peut suffire à causer un préjudice effectif et actuel au caractère distinctif de la marque antérieure ou à faire naitre un risque sérieux qu’un tel préjudice se produise dans le futur;
- Le préjudice porté au caractère distinctif de la marque antérieure est constitué dès lors que se trouve affaiblie l’aptitude de cette marque à identifier les produits ou services pour lesquels elle est enregistrée et utilisée comme provenant du titulaire de ladite marque ;
- Il est indifférent aux fins d’apprécier si l’usage de la marque postérieure porterait préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure que le titulaire de la marque postérieure tire ou non un réel avantage commercial du caractère distinctif de la marque antérieure.
Les arguments ci-dessus avancés par l’opposante sont des principes de jurisprudence d’ordre général qui ne sont pas manifestement applicables au cas d’espèce faute d’un raisonnement spécifique.
L’article 8, paragraphe 5, du RMUE n’a pas pour objet d’empêcher l’enregistrement de toutes les marques identiques ou similaires à une marque renommée. Conformément à la jurisprudence constante, lorsque «la condition tirée de la renommée est remplie, [le juge] doit procéder à l’examen de la seconde condition, à savoir l’existence d’une atteinte sans juste motif à la marque antérieure» (14/09/1999, C-375/97, Chevy, EU:C:1999:408, § 30).
L’approche consistant à conclure à ce préjudice uniquement parce que la marque antérieure jouit d’une renommée et est identique ou similaire à la marque faisant l’objet de la demande entraînerait l’application automatique et univoque d’une constatation de risque de dilution à l’encontre de toutes les marques similaires à des marques renommées et irait à l’encontre de l’obligation de prouver le préjudice.
Dans le cadre de l’affaire «Intel», citée par l’opposante, la Cour a soutenu que l’article 4, paragraphe 4, point a), de la directive sur les marques (l’équivalent de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE) doit être interprété comme signifiant que, pour prouver que l’utilisation de la marque postérieure porterait préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure, il convient de démontrer une «modification du comportement économique» du consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée, ou un risque sérieux qu’une telle modification se produise dans le futur.
La Cour a développé la notion de «modification du comportement économique» des consommateurs moyens dans son arrêt du 14/11/2013, C-383/12 P, Représentation d'une tête de loup, EU:C:2013:741. La Cour a indiqué que cette notion pose une condition de nature objective autonome qui ne saurait être déduite uniquement des éléments subjectifs tels que la seule perception que peuvent avoir les consommateurs de la dispersion de l’image et de l’identité de la marque réputée. Le seul fait que les consommateurs remarquent la présence d’un nouveau signe similaire, susceptible d’annuler la possibilité pour la marque antérieure d’identifier les biens pour lesquels elle est enregistrée comme provenant du propriétaire de la marque ne suffit pas à lui seul à établir l’existence d’un préjudice ou d’un risque de préjudice pour le caractère distinctif de la marque réputée (points 35-40).
Même si l’opposante n’a pas besoin de fournir la preuve actuelle d’un préjudice, elle doit convaincre l’Office en produisant des preuves d’un risque futur sérieux de préjudice, qui ne soit pas simplement hypothétique. L’opposante peut le faire en soumettant des preuves du risque de préjudice sur la base de déductions logiques résultant d’une analyse des probabilités (et non sur de simples suppositions) et en prenant en compte les pratiques habituelles dans le secteur commercial pertinent ainsi que toutes autres circonstances de l’espèce (arrêt du 16/04/2008, T-181/05, Citi, EU:T:2008:112, § 78, tel que cité dans l’arrêt du 22/05/2012, T-570/10, Représentation d'une tête de loup, EU:T:2012:250, § 52 et confirmé en recours par l’arrêt du 14/11/2013, C-383/12 P, Représentation d'une tête de loup, EU:C:2013:741, § 42-43).
Elle doit donc démontrer de manière spécifique comment, en tenant compte des deux marques, des produits et services en question et de toutes les circonstances pertinentes, le préjudice allégué pourrait exister.
En l’espèce, l’opposante ne mentionne même pas les secteurs commerciaux en cause et se limite à des affirmations très générales.
Compte tenu de ce qui précède, ainsi que du fait que ni la similitude entre les signes ni la renommée de la marque antérieure, ne sont particulièrement élevées, la division d’opposition conclut qu’il n’est pas établi que l’usage de la marque contestée porterait préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure.
Préjudice porté à la renommée (ternissement)
Le préjudice porté à la renommée est constitué lorsque les produits ou services pour lesquels la marque contestée est utilisée sont ressentis par le public d’une manière telle que la force d’attraction de la marque antérieure en est diminuée. Le risque de ce préjudice peut, notamment, se produire lorsque lesdits produits ou services possèdent une caractéristique ou une qualité susceptibles d’exercer une influence négative sur l’image d’une marque antérieure renommée, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque contestée (18/06/2009, C-487/07, L’Oréal, EU:C:2009:378, § 40, et 22/03/2007, T-215/03, Vips, EU:T:2007:93, § 39).
À cet égard, l’opposante fait référence à l’arrêt susmentionné et allègue que :
- La marque opposante est associée à certaines valeurs dont la liberté et l’individualité ;
- L’organisation « Harley-Davidson » maintient ces valeurs en contrôlant étroitement l’usage de ses marques sur les produits, celles-ci ne sont donc apposées que sur des produits qui répondent à des normes de qualité rigoureuse ;
- L’opposante ne sera pas en mesure de contrôler la manière dont le déposant utilise sa marque ce qui pourrait s’avérer préjudiciable à l’image créée par l’opposante et ternira sa renommée.
L’existence des atteintes constituées par le préjudice porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure doit être appréciée dans le chef du consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels cette marque est enregistrée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 35).
L’opposante allègue que les produits du titulaire peuvent ternir son image car ils pourraient être de qualité inférieure. Cet argument n’est pas un moyen valable pour démontrer l’existence d’un préjudice.
Il n’y a pas lieu dans la présente procédure de procéder à une évaluation et à une comparaison de la qualité des produits et des services actuellement commercialisés par chaque partie sous les signes en cause.
Tout d’abord, parce qu’un tel exercice, outre le fait qu’il est extrêmement subjectif, ne serait pas réalisable lorsque les produits et services ne sont pas identiques et lorsque la marque contestée n’a pas encore fait l’objet d’un usage.
Deuxièmement et surtout, il serait erroné d’apprécier l’article 8, paragraphe 5, du RMUE sur la base de la qualité des produits et des services proposés sous la marque postérieure. Admettre le contraire reviendrait à admettre que le titulaire puisse revendiquer comme moyen de défense valable le fait que ses produits et services sont de qualité égale, voire supérieure, à ceux de l’opposante, alors qu’il ressort clairement du libellé de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE que c’est simplement l’usage de la marque contestée qui doit porter préjudice à la renommée de la marque antérieure.
Par conséquent, afin de déterminer si l’usage de la marque contestée est susceptible de porter préjudice à la renommée de la marque antérieure, la division d’opposition ne peut prendre en considération que les produits et services tels qu’ils apparaissent dans la liste des produits et services de chaque marque. Les effets négatifs de l’usage du signe contesté pour les produits et les services visés dans la demande doivent résulter de la nature et des caractéristiques habituelles des produits concernés en général.
La division d’opposition fait également valoir que, dans ce cadre, le titulaire d’une marque renommée n’est pas sans protection face à l’usage d’une marque similaire pour des produits et services d’une nature comparable et d’une qualité manifestement inférieure. L’érosion de la renommée et de la grande estime dont bénéficie la marque antérieure au sein du public pertinent dans ce cas signifierait que le public associerait les produits et services de qualité inférieure couverts par la marque postérieure à la marque antérieure, en induisant ainsi un rapprochement entre eux quant à leur origine commerciale. Sans ce rapprochement, la qualité inférieure des produits et services couverts par la marque postérieure ne porterait pas atteinte à la grande estime dont bénéficie la marque antérieure parmi sa clientèle. En conséquence, en l’absence d’un tel rapprochement, l’atteinte à la renommée de la marque antérieure ne se produira probablement pas. Si, d’autre part, ce rapport devait exister, cette circonstance signifierait inévitablement que l’usage de la marque contestée tirerait profit de la renommée de la marque antérieure. Ce profit serait nécessairement indu parce qu’il appartient au titulaire de la marque renommée d’exploiter et de tirer profit de cette renommée. L’exploitation de la renommée de la marque antérieure est en principe interdite à toute partie non autorisée, indépendamment du fait que les produits et services commercialisés sous la marque postérieure soient ou non de qualité inférieure. Dans une telle hypothèse, l’article 8, paragraphe 5, du RMUE s’appliquerait non pas en raison de la qualité inférieure des produits et services contestés, mais parce qu’un profit indu serait tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure.
Au surplus, la division d’opposition fait valoir que les documents apportés n’apportent pas la preuve que la marque antérieure jouisse effectivement auprès du public de l’image de liberté et d’individualité revendiquée par l’opposante, de sorte que les arguments à l’appui du ternissement de cette image sont infondés.
Eu égard aux observations qui précèdent, la division d’opposition conclut que rien ne suggère que l’usage de la marque contestée porterait préjudice à la renommée de la marque antérieure.
Profit indu (parasitisme)
Dans le contexte de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE, la notion de profit indu englobe les cas où il y a exploitation et «parasitisme» manifestes d’une marque célèbre ou une tentative de tirer profit de sa réputation. En d’autres termes, il s’agit du risque que l’image de la marque renommée ou les caractéristiques projetées par cette dernière soient transférées aux produits et services désignés par la marque contestée, de sorte que leur commercialisation serait facilitée par cette association avec la marque antérieure renommée (06/07/2012, T-60/10, Royal Shakespeare, EU:T:2012:348, § 48, et 22/03/2007, T-215/03, Vips, EU:T:2007:93, § 40).
L’opposante avance les arguments suivants :
- Elle se reporte à la jurisprudence relative au type de préjudice concerné pour définir la notion de profit indu ;
- Elle cite notamment le principe selon lequel plus l’évocation de la marque par le signe est immédiate et forte, plus est important le risque que l’utilisation du signe postérieur tire un profit indu du caractère distinctif ou de la renommée de la marque intérieure.
- Elle affirme que la marque contestée est tellement similaire aux marques antérieures qu’elle évoquera immédiatement la marque antérieure dans l’esprit du consommateur moyen. Elle ajoute qu’il existe un risque de confusion qui augmente la probabilité d’un profit indu.
- Elle avance que la marque antérieure a fait l’objet de développements et d’investissements importants au fil des années, et est ainsi devenue l’une des marques de motos les plus prestigieuses au monde.
- Elle déduit de ce qui précède que l’usage de la marque contestée tirera inévitablement profit de la renommée de la marque opposante car le consommateur moyen associera les produits commercialisés sous la marque à ceux de l’opposante.
Selon la Cour de Justice de l’Union européenne, … s’agissant de l’atteinte constituée par le profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, dans la mesure où ce qui est prohibé est l’avantage tiré de cette marque par la titulaire de la marque postérieure, l’existence de ladite atteinte doit être appréciée dans le chef du consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels la marque postérieure est enregistrée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (27/11/2008, C-252/07, Intel, EU:C:2008:655, § 36.)
En l’espèce, les documents apportés par l’opposante font la preuve d’une activité promotionnelle importante notamment à travers l’organisation de nombreuses manifestations dans plusieurs pays de l’Union européenne. Le succès de ces manifestations se traduit non seulement par le nombre de fans de motos qui y participent mais également par leur retentissement dans la presse, notamment du Royaume-Uni.
Cependant, l’argumentation soumise par l’opposante à l’appui du profit indu sont basées sur des prémisses contraires aux conclusions de la division d’opposition. En particulier, la division d’opposition juge que le lien entre les signes n’est pas particulièrement immédiat et que les signes ne sont pas fortement similaires. Il convient de surcroît de remarquer que dans son arrêt du 18/06/2009, C-487/07, L’Oréal, EU:C:2009:378, la Cour a fait savoir qu’il y a profit indu lorsqu’il y a un transfert de l’image de la marque ou des caractéristiques projetées par celle-ci vers les produits désignés par le signe identique ou similaire. En l’espèce, l’opposante ne mentionne dans ses allégations spécifiques à l’appui du profit indu ni le fait que la marque antérieure est associée à une image particulière ni de quelle façon cette image serait susceptible d’être projetée sur les produits contestés, notamment de la classe 25. Elle ne mentionne pas non plus spécifiquement les produits pour lesquels la marque antérieure est renommée. Les arguments soumis sont ainsi très généraux et vagues semblant être basés sur le fait qu’il existe une renommée exceptionnelle de la marque antérieure pour nombre de produits et que cette renommée associée à une très grande similitude des signes se traduit nécessairement par un profit indu indépendamment des produits contestés sur lesquels la marque contestée est utilisé. Ainsi qu’il a été établi, les prémisses de cette argumentation ne correspnodent pas aux conclusions du cas d’espèce. L’opposante a certes évoqué dans le contexte de ses arguments à l’appui de la renommée de la marque antérieure le fait que celle-ci est associée à une image de liberté et d’individualité, mais d’une part, ainsi que précédemment indiqué, une telle image ne ressort pas des documents de preuve apportés et d’autre part, l’opposante n’indique pas dans ses arguments de quelle manière une telle image associée à des motos pourrait être projetée sur des produits dans la classe 25.
Eu égard aux observations qui précèdent, la division d’opposition conclut que les arguments de l’opposante ne permettent pas d’établir un risque sérieux que la marque contestée puisse tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure.
Il résulte de ce qui précède que l’opposante n’a pas démontré que l’usage de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, comme l’exige l’article 8, paragraphe 5, du RMUE. L’une des conditions nécessaires n’étant pas remplie, l’opposition doit être rejetée comme n’étant pas bien fondée au titre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE.
L’article 8, paragraphe 5, du RMUE, est également invoqué en relation avec les enregistrements de l’Union européenne n° 2 134 500 et n° 1 797 018 de la marque « HARLEY-DAVIDSON ». Les marques en question ne sont pas enregistrées pour des motos (dans la classe 12) mais seulement pour des produits dans les classes 3, 9, 16, 18, 26, 28 pour la première et des produits et services dans les classes 25 et 39 pour la seconde. Les preuves de renommée sont les mêmes pour toutes les marques opposantes et ne sont concluantes que pour des motos. Ainsi, l’opposante n’a pas apporté la preuve de la renommée de ces deux autres marques et, l’une des conditions de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE n’étant pas remplie pour celles-ci, l’opposition sur la base de ce motif est rejetée en ce qui les concerne.
L’examen de l’opposition se poursuit en relation avec l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE.
RISQUE DE CONFUSION – ARTICLE 8, PARAGRAPHE 1, POINT b), DU RMUE
On entend par risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause, à condition de porter les marques en cause, proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. L’existence d’un risque de confusion doit être appréciée globalement en tenant compte de plusieurs facteurs interdépendants. Ces facteurs incluent la similitude des signes, la similitude des produits et services, le caractère distinctif de la marque antérieure, les éléments distinctifs et dominants des signes en litige et le public pertinent.
L’opposition est fondée sur plus d’une marque antérieure. La division d’opposition estime qu’il y a lieu d’examiner d’abord l’opposition par rapport aux enregistrements de l’Union européenne n° 83 931 « HARLEY » et n° 2 134 500 « HARLEY-DAVIDSON ».
- Les produits et services
Les produits et services sur lesquels est fondée l’opposition sont:
MUE nº 83 931 « HARLEY »
Classe 9: Lunettes; lunettes de soleil; lunettes (en plastique); casques de protection; pièces et indicateurs électriques pour motocyclettes, à savoir tachymètres, compteurs de tours, batteries, câblage, régulateurs de vitesse, commutateurs, bougies, contacts de rupture, pièces d'allumage, radios, clignotants, raccords terminaux, interrupteurs de circuit, thermostats, chargeurs de batteries, armatures, régulateurs de voltage; bandes vidéo et vidéodisques préenregistrés et vierges, magnétoscopes et lecteurs de bandes vidéo, rebobineurs de bandes vidéo, postes de télévision, équipement stéréo, cassettes et disques audio préenregistrés et vierges, juke boxes, enregistreurs et lecteurs audio, haut-parleurs, lecteurs de disques, récepteurs, logiciels enregistrés, appareils automatiques à prépaiement, flippers et amplificateurs.
Classe 12: Appareils de locomotion par terre, par air, par eau, rails et leurs pièces non compris dans d'autres classes; indicateurs de direction et claxons.
Classe 14: Médaillons non en métaux précieux.
Classe 25 : Vêtements d'extérieur, chandails, bretelles, foulards, bandanas, mouchoirs, vestes, manteaux, gilets, gants, jeans, chaps, chemises, shorts, casquettes, chapeaux, chapellerie, chapeaux tricotés, chapeaux de pluie, ceintures, bandeaux pour les poignets, surtouts, bonneterie, cols-bretelles, cravates, robes de nuit, chemises de nuit; pyjamas, pantalons, vêtements de pluie, manteaux de pluie, chemises, sweat-shirts, pantalons de training, débardeurs, t-shirts, sous-vêtements, costumes, bandeaux, collants, tabliers, mitaines, lingerie, vêtements en cuir, maillots de bain, jupes, bavoirs; chaussures, à savoir chaussures et bottes, et pièces de chaussures, à savoir bouts de chaussures, patins, protections pour talons.
Classe 26 : Décorations pour les cheveux et les vêtements non en métaux précieux, boucles de ceintures non en métaux précieux, broderies, boutons, fermetures à glissières, épingles autres qu'articles de bijouterie; insignes, lanières décoratives
MUE n° 2 134 500 « HARLEY-DAVIDSON »
Classe 3: Lotions après-rasage et eau de Cologne, parfums, savons, produits de soins personnels, produits de soin pour les cheveux, préparations pour nettoyer et polir, produits pour le cuir.
Classe 9 : Lunettes; lunettes de soleil; lunettes de protection; casques de protection; pièces et indicateurs électriques pour motocyclettes, à savoir radios, tachymètres, compteurs de tours, batteries, câblage, régulateurs de vitesse, commutateurs, contacts de rupture, indicateurs de direction, têtes de raccordement, démarreurs, interrupteurs de circuit, thermostats, chargeurs de batteries, armatures, régulateurs de tension;bandes et disques vidéo préenregistrés et vierges, équipements audio et vidéo, postes de télévision, équipements stéréo, bandes et disques audio préenregistrés et vierges, juke-boxes, lecteurs de disques, téléphones, logiciels enregistrés, appareils à prépaiement automatiques et flippers.
Classe 16 : Papeterie, livres, autocollants, housses de chéquiers, cartes à jouer, calendriers, décalcomanies, albums photo, affiches, publications et produits de l'imprimerie, atlas routiers, manuels d'entretien pour motos, catalogues de pièces détachées de motos, catalogues et listes d'accessoires, livres et manuels d'instruction, cartes de voeux, bannières relatives au motocyclisme, papier à écrire, stylos à bille et crayons, chapeaux en papier, nappes en papier, serviettes en papier, photographies, images, sacs en papier ou en matières plastiques pour l'emballage et l'empaquetage;tatouages (effaçables) et décalcomanies
Classe 18 : Sellerie, porte-monnaie, portefeuilles, sacs à dos, sacs de paquetage, trousses de selles de motos, porte-clés et porte-clés en cuir, sacs à vêtements, étuis de clés, valises, fourre-tout, porte-documents, mallettes pour documents, pochettes porte-chéquier, bagages, sacs de voyage;housses en cuir pour récipients à boissons;sacs à main, sacs banane, havresacs, sacoches, sacs à dos, parapluies et parasols, valises, malles, pochettes et supports pour blocs-notes en cuir.
Classe 26 : Ornements pour cheveux et vêtements non en métaux précieux, boucles de ceinture non en métaux précieux, broderies, boutons, fermetures à glissière, épingles autre que bijouterie, insignes, badges brodés, lanières décoratives pour bottes.
Classe 28 : Jouets, animaux en peluche, banques (jouets), maquettes, chevaux à bascule, fléchettes, cibles de fléchettes, camions (jouets), véhicules téléguidés, véhicules (jouets), véhicules miniatures, trains, avions, traîneaux, trains miniatures, maquettes de véhicules, ballons, puzzles, tables de billard, flippers, frisbees, jouets gonflables, décorations pour arbres de Noël, cannes à pêche et matériel de pêche, poupées, vêtements de poupées, jeux de société, balles de jeu.
Les produits et services contestés sont les suivants:
Classe 3 : Baumes après-rasage; émulsions après-rasage; gels après-rasage; eaux de Cologne après-rasage; préparations avant et après-rasage; préparations après-rasage; crèmes à raser; crèmes à raser; lotions après-rasage; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux; produits de parfumerie, produits odorants et encens; menthe pour la parfumerie; produits de parfumerie synthétiques; produits odorants et produits de parfumerie; extraits de fleurs (parfumerie); savons antibactériens pour la peau; savons antibactériens; savons d'avivage; savons de bain; savons pour le bain sous forme liquide, solide ou de gel; savons-crèmes; savons désinfectants parfumés; savons désinfectants; savons désodorisants; savons liquides pour le bain; savons liquides pour les mains et le visage; savons liquides; savons liquides pour bains de pieds; savons pour le visage; savons granuleux; savons pour les mains; savons pour le corps; savons cosmétiques; savons médicinaux; savons parfumés; savons luffas; savons industriels; savons à usage domestique; déodorants pour soins corporels; produits rafraîchissants pour la peau à usage cosmétique; crèmes après-soleil (à usage cosmétique); préparations d'aloe vera à usage cosmétique; aromates pour boissons (huiles essentielles); produits pour rafraîchir l'haleine autres qu'à usage médical; huiles essentielles en tant que produits odorants pour la lessive; huiles essentielles à usage personnel; huiles essentielles pour l'aromathérapie; sels et gels de bain et douche, autres qu'à usage médical; crèmes, huiles, lotions, sprays, crayons et baumes à usage cosmétique; émulsions, gels et lotions pour les soins de la peau; laits et lotions pour le visage (à usage cosmétique); savons liquides pour les mains, le visage et le corps; dentifrices; dentifrices liquides; dentifrices sous forme de chewing-gums; produits à polir pour instruments de musique.
Classe 15 : Basses (instruments de musique); cymbales; instruments de musique électriques et électroniques; étuis pour instruments de musique; instruments de musique; socles pour instruments de musique; cordes d'instruments de musique; chevalets pour instruments de musique; guitares acoustiques; basses (guitares); guitares électriques; guitares; sangles pour guitares; cordes de guitares; médiators pour guitares; diapasons; instruments à percussion; tambours et instruments à percussion; appareils pour accorder les instruments de musique.
Classe 25 : Vêtements; articles vestimentaires en lin; vêtements en soie; vêtements pour garçons; vêtements, chaussures, chapellerie; vêtements en cuir ou imitations de cuir; tenues pour les loisirs; articles vestimentaires tissés; vêtements pour hommes; ceintures en cuir (habillement); vêtements de dessus; cache-nez; sous-vêtements absorbant la transpiration; vêtements imperméabilisés; articles vestimentaires coupe-vent; chaussures; escarpins; souliers pour hommes; chaussures pour dames et pour hommes; articles chaussants pour l'athlétisme; chaussures de sport; souliers de sport; clous pour chaussures de sport; bandanas (foulards); habillement pour automobilistes; vêtements de sport; vestes de pêche; combinaisons humides pour le surf; combinaisons humides pour les sports nautiques de surface; chaussettes habillées pour hommes; bottes de motocyclisme; tenues de soirée; costumes; complets-veston; maillots de bain; maillots de bain pour dames; maillots de bain pour hommes; maillots de bain ajustés à balconnets; costumes trois pièces (habillement); chemises pour costumes; costumes pour hommes; tailleurs-pantalons; survêtements; costumes en cuir; combinaisons de pluie pour motocyclistes; chemises tissées; chemises de golf; chemises hawaïennes; chemises hawaïennes à boutonnage devant; chemises; chemises à col ouvert; chemisettes; chemises à manches longues; chemises habillées; débardeurs de sport; chemises de sport à manches courtes; maillots de sport anti-humidité; sous-vêtements pour hommes; caleçons longs en tant que sous-vêtements; shorties (sous-vêtements); sous-vêtements thermiques; sous-vêtements; cravates; lavallières; cravates-western (cordelières); blazers; ceintures de smoking; vestes d'intérieur; smokings; vestes de survêtement; vestes; vestes pour motocyclistes; cirés; vestes de sport.
Certains des produits contestés, par exemple les lotions après-rasage, savons dans la classe 3, sont identiques à des produits couverts par la marque antérieure n° 2 134 500 « HARLEY-DAVIDSON ». De même, la plupart des produits contestés dans la classe 25 sont identiques à des produits couverts par la marque nº 83 931 « HARLEY » dans cette même classe.
Par souci d’économie de procédure, la division d’opposition ne procédera pas à une comparaison complète des produits énumérés ci-dessus. L’examen de l’opposition sera effectué comme si tous les produits contestés dans les trois classes concernées étaient identiques aux produits couverts par les marques antérieures.
Il sera toutefois pris en compte que, parmi les produits opposants, les produits dans la classe 12 pour lesquels est enregistrée la marque antérieure nº 83 931, ne sauraient être identiques aux produits contestés et sont même différents de tous ceux-ci. Il n’existe pas de lien entre les appareils de locomotion et leurs pièces/accessoires et les produits contestés des classes 3, 15 et 25, du point de vue de leurs natures, destinations, fabricants et points de ventes. Il ne s’agit pas non plus de produits complémentaires ou en situation de concurrence. En particulier, le fait que les vêtements contestés incluent des vêtements spécifiquement destinés au motocyclisme ne permet pas d’établir que de tels produits sont complémentaires car ils ne sont pas indispensables ou essentiels les uns aux autres.
- Public pertinent – niveau d’attention
Le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a lieu également de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou services en cause.
En l’espèce, les produits présumés identiques s’adressent au grand public.
Le niveau d’attention est considéré comme moyen.
- Les signes
HARLEY
HARLEY-DAVIDSON
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Marques antérieures |
Marque contestée |
Le territoire pertinent est l’Union européenne.
L’appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci (11/11/1997, C–251/95, Sabèl, EU:C:1997:528, § 23).
La marque antérieure « HARLEY » et la marque contestée ont déjà été comparées dans le cadre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE selon les critères également applicables à la comparaison dans de l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE. Elles ont été jugées similaires à un faible degré sur le plan visuel. Pour le public de langue anglaise, elles sont également phonétiquement similaires à un degré moyen et conceptuellement similaires à un faible degré. Pour le public non anglophone, la similitude phonétique est de faible degré et les signes ne sont pas similaires sur le plan conceptuel.
La marque antérieure « HARLEY-DAVIDSON » est de toute évidence moins similaire à la marque contestée que la marque « HARLEY ». Elle comporte en effet l’élément additionnel « DAVIDSON » en tout point différent de l’élément « CHARPER » de la marque contestée, ce qui accroît sensiblement les différences visuelles, phonétiques et conceptuelles. De plus, dans cette marque antérieure, compte tenu du trait d’union, il est hautement probable que l’expression « HARLEY-DAVIDSON » sera perçue comme un nom de famille composé ou deux noms de famille juxtaposés. La présence d’un trait d’union n’est pas habituelle entre un prénom et un nom de famille.
Ainsi, visuellement, la marque contestée et la marque antérieure « HARLEY-DAVIDSON » ne sont similaires que dans une très faible mesure pour l’ensemble du public.
Phonétiquement, la similitude entre ces marques est de faible degré pour le public anglophone car si les éléments « HARLEY » et « HARLIE » se prononcent de manière identique, l’autre élément est clairement différent y compris du point de vue de sa longueur, et de surcroît, il s’agit pour le moins dans la marque contestée de l’élément qui a la plus forte valeur en tant qu’indicateur de l’origine commerciale des produits contestés. Pour le public non anglophone, la similitude phonétique est très faible se réduisant aux sons des trois quatre premières lettres face aux nombreuses lettres suivantes prononcées différemment (EY-DAVIDSON v IE CHARPER).
Conceptuellement, les signes en question ne sont pas similaires en ce qui concerne le public non anglophone car la marque antérieure évoque deux noms de famille, un prénom et un nom ou ne donne lieu à aucune association conceptuelle alors que la marque contestée évoque un autre prénom, et un autre nom de famille. Pour le public anglophone, il n’existe pas non plus de similitude car le seul fait que « HARLIE » est une variante de « HARLEY » est inopérant face aux différences dans le nom de famille et compte tenu également du fait que « HARLEY » sera très vraisemblablement perçu comme un nom de famille et non un prénom.
Dans la mesure où les deux signes antérieurs et le signe contesté présentent des similitudes au regard d’un aspect de la comparaison au moins, l’examen du risque de confusion se poursuit.
- Caractère distinctif des marques antérieures
Le caractère distinctif de la marque antérieure est l’un des facteurs à prendre en considération lors de l’appréciation globale du risque de confusion.
Selon l’opposante, les marques antérieures jouissent d’une renommée auprès du public de l’Union européenne et de chaque état-membre de l’Union européenne pour l’ensemble des produits pour lesquels elles ont été enregistrées.
Cette allégation doit être dûment examinée dans la mesure où le caractère distinctif de la marque antérieure fait partie des éléments à prendre en considération dans l’appréciation du risque de confusion. En effet, «le risque de confusion est d'autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s'avère important» et, par conséquent, les marques qui ont un caractère distinctif élevé en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d'une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (29/09/1998, C-39/97, Canon, EU:C:1998:442, § 18).
Les éléments apportés à l’appui de la renommée des marques antérieures ont été évalués dans le cadre de l’examen de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE et ont conduit à la conclusion qu’il existe une renommée en relation avec, exclusivement, des motos dans la classe 12.
La marque antérieure « HARLEY-DAVIDSON » nº 2 134 500 ne couvre pas de tels produits.
En tout état de cause, en ce qui concerne l’autre marque antérieure qui couvre des appareils de locomotion par terre et donc des motos, il n’existe pas, ainsi que cela a été établi plus haut, de point de contact entre les motos de l’opposante et les produits contestés dans les classes 3, 15 et 25 au regard des critères « Canon » de la comparaison s’agissant ainsi de produits dissimilaires. Par conséquent, la renommée des marques antérieures pour des motos est inopérante dans le cadre de la présente analyse.
Au regard des produits antérieurs présumés identiques, l’appréciation du caractère distinctif des marques antérieures reposera sur leur caractère distinctif intrinsèque. En l’espèce, les marques antérieures dans leur ensemble n’ont pas de signification en rapport avec les produits en question du point de vue du public du territoire pertinent. Dès lors, le caractère distinctif des marques antérieures doit être considéré comme normal.
- Appréciation globale, autres arguments et conclusion
Le risque de confusion désigne les situations dans lesquelles le consommateur confond directement les marques entre elles ou fait un rapprochement entre les signes en conflit et suppose que les produits/services désignés proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement.
L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits et services peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement (29/09/1998, C-39/97, Canon, EU:C:1998:442, § 17).
Les marques antérieures disposent d’un caractère distinctif normal au regard de tous les produits pertinents.
La marque antérieure « HARLEY » est similaire à la marque contestée à un faible degré sur le plan visuel, au mieux à un moyen degré sur le plan phonétique et à un faible degré sur le plan conceptuel.
La marque antérieure « HARLEY-DAVIDSON » est moins similaire à la marque contestée, soit similaire à un très faible degré sur le plan visuel et à un faible degré sur le plan phonétique, sans qu’il n’existe de similitude conceptuelle.
Selon la division d’opposition, même dans l’hypothèse de produits identiques, compte tenu du principe d’interdépendance susmentionné et de la similitude limitée entre les signes, en l’absence d’un caractère distinctif accru par l’usage ou d’une renommée des marques antérieures, il n’existe pas de risque de confusion pour les produits en question.
Il y a donc lieu de rejeter l’opposition sur la base de ces marques antérieures.
L’opposante a également fondé son opposition sur les marques antérieures suivantes :
- Enregistrement de l’Union européenne n° 1 797 018 de la marque « HARLEY-DAVIDSON » pour des produits et services dans les classes 25 et 39 : un risque de confusion ayant été exclu, dans l’hypothèse de produits identiques, avec la marque antérieure n° 2 134 500 relative au même signe, il ne saurait exister de risque de confusion sur la base de ce troisième enregistrement de l’opposante, compte tenu également du fait que le caractère distinctif de la marque est normal pour les produits et services concernés.
- Deux marques notoirement connues au sens de l’Article 6bis de la Convention de Paris, invoquées sur la base de l’article 8, paragraphe 2, point c), du RMUE, en relation avec l’article 8, paragraphe 1, point b) du RMUE. Il s’agit des marques « HARLEY » et « HARLEY-DAVIDSON ». En ce qui concerne ces marques, l’opposition est basée sur les produits et services suivants :
Motocyclettes, pièces et accessoires de motocyclettes, services de réparation de motocyclettes, prestations de services per les concessionnaires de motocyclettes de la Partie ayant formé opposition, vêtements, publications imprimées, souvenirs et produits associés aux motocyclettes de la Partie ayant formé opposition et autres biens et services divers.
Les preuves à l’appui du caractère notoirement connu des marques ci-dessus sont les mêmes que celles fournies à l’appui de la renommée des enregistrements antérieurs. Ainsi, le caractère notoirement connu des marques en question ne concerne, au vu de ces preuves, que des motos. Ces produits étant différents de tous les produits contestés, il n’existe pas de risque de confusion avec les marques antérieures en question et l’opposition est donc également rejetée en ce qui les concerne.
Il convient à présent d’examiner l’opposition sur la base de l’article 8, paragraphe 4, du RMUE.
MARQUE NON ENREGISTRÉE OU AUTRE SIGNE UTILISÉ DANS LA VIE DES AFFAIRES – ARTICLE 8, PARAGRAPHE 4, DU RMUE
Conformément à l’article 8, paragraphe 4, du RMUE, sur opposition de la titulaire d’une marque non enregistrée ou d’un autre signe utilisé dans la vie des affaires dont la portée n’est pas seulement locale, la marque demandée est refusée à l’enregistrement, lorsque et dans la mesure où, selon la législation de l’Union ou le droit de l’État membre qui est applicable à ce signe :
(a) des droits à ce signe ont été acquis avant la date de dépôt de la demande de marque de l’Union européenne ou, le cas échéant, avant la date de la priorité invoquée à l’appui de la demande de marque de l’Union européenne ;
(b) ce signe donne à sa titulaire le droit d’interdire l’utilisation d'une marque plus récente.
Partant, les motifs du refus de l’article 8, paragraphe 4, du RMUE sont soumis aux exigences ci-après :
- Le signe antérieur doit avoir été utilisé dans la vie des affaires dont la portée n’est pas seulement locale avant que la marque contestée ne soit déposée ;
- Conformément à la loi en vigueur, avant le dépôt de la marque contestée, l’opposante a acquis des droits sur le signe faisant l’objet de l’opposition, notamment celui d’interdire l'utilisation d'une marque plus récente ;
- Les conditions dans lesquelles l’utilisation d’une marque plus récente peut être interdite sont réunies s’agissant de la marque contestée.
Ces conditions sont cumulatives. Ainsi, lorsqu’un signe ne satisfait pas l’une de ces conditions, l’opposition fondée sur l’existence d’une marque non enregistrée ou d’autres signes utilisés dans la vie des affaires au sens de l’article 8, paragraphe 4, du RMUE, ne peut aboutir.
En l’espèce, l’opposition est basée sur les marques non-enregistrées « HARLEY » et « HARLEY-DAVIDSON » utilisées dans la vie des affaires au Royaume-Uni et en Irlande.
Le droit en vertu du droit applicable
L'opposition est fondée sur des marques non enregistrées utilisées au Royaume-Uni et en Irlande. L'opposante revendique le droit d'interdire l'usage de la marque demandée en vertu de l’action en responsabilité délictuelle pour commercialisation trompeuse («passing off»).
Conformément à l’article 76, paragraphe 1, du RMUE, au cours de la procédure, l’Office procède à l’examen d’office des faits ; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.
Conformément à la règle 19, paragraphe 2, point d), du REMUE, si l'opposition est fondée sur l'existence d'un droit antérieur au sens de l'article 8, paragraphe 4, du RMUE, l’opposant fournit la preuve de son acquisition, de sa permanence et de l'étendue de la protection de ce droit.
Partant, il incombe à l’opposante de fournir toutes les informations nécessaires à la prise de la décision, en identifiant notamment la loi applicable et en communiquant tous les données nécessaires à sa parfaite application. Selon la jurisprudence, il incombe à l'opposante « … de présenter à l’EUIPO non seulement les éléments démontrant qu’[elle] remplit les conditions requises, conformément à la législation nationale dont [elle] demande l’application … mais aussi les éléments établissant le contenu de cette législation» (05/07/2011, C-263/09 P, Elio Fiorucci, EU:C:2011:452, § 50). Les preuves présentées doivent permettre à la division d’opposition de déterminer avec certitude qu’un droit particulier est prévu dans la loi concernée ainsi que les conditions d’acquisition de ce droit. Les preuves doivent en outre permettre de déterminer si la titulaire de ce droit est habilitée à interdire l’utilisation d’une marque plus récente ainsi que les conditions dans lesquelles ce droit peut prévaloir et être appliqué vis-à-vis de la marque plus récente.
Il ne suffit pas de faire une référence au tableau de synthèse fourni à titre purement informatif à la fin des directives de l’Office relatives à l’article 8, paragraphe 4, du RMUE. Ce tableau contenant une description des dispositions juridiques à des fins purement informatives, une simple référence à celui-ci n’exonère par l’opposante de l’obligation de prouver que la législation pertinente applicable au signe lui confère le droit d’interdire l’usage d’une marque plus récente, comme décrit ci-dessus (voir la décision du 22/01/2013, R 1182/2011-4, Crown Lounge (fig.), § 48-50).
Dans le cas d’espèce, l'opposante n'a pas fourni suffisamment d'informations sur la protection juridique accordée au type de signe commercial invoqué par l'opposante, à savoir le droit commun du passing-off ni sur les conditions d’application du passing-off au cas d’espèce. Elle se limite en effet à citer le tableau susmentionné et à énumérer brièvement les conditions prévues par le « passing off » en renvoyant de manière générale à son exposé à l’appui des autres motifs invoqués. Elle n’a pas apporté de publications ou d’arrêts faisant autorité en matière d’interprétation de ce type de loi.
Les informations apportées par l’opposante en relation avec le droit applicable étant insuffisantes, l’opposition n’est pas bien fondée en vertu de l’article 8, paragraphe 4, du RMUE.
FRAIS
Conformément à l’article 85, paragraphe 1, du RMUE, la partie perdante dans une procédure d’opposition supporte les frais et taxes exposés par l’autre partie.
L’opposante étant la partie perdante, elle doit supporter les frais exposés par le titulaire aux fins de la présente procédure.
Conformément à la règle 94, paragraphe 3 et à la règle 94, paragraphe 7, point d), sous ii), du REMUE, les frais à rembourser au titulaire sont les frais de représentation dont le montant est fixé dans la limite du taux maximal déterminé dans le REMUE.
La division d’opposition
Frédérique SULPICE
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Catherine MEDINA |
Pedro JURADO MONTEJANO
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Conformément à l’article 59 du RMUE, toute partie lésée par cette décision peut former un recours à son encontre. Conformément à l’article 60 du RMUE, le recours doit être formé par écrit auprès de l’Office dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la présente décision. Il doit être déposé dans la langue de procédure de la décision attaquée. En outre, un mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé par écrit dans un délai de quatre mois à compter de cette même date. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours de 720 EUR.
Le montant déterminé lors de la répartition des frais ne peut être révisé que par une décision de la division d’opposition, sur requête. Conformément à la règle 94, paragraphe 4, du REMUE, la requête doit être présentée dans le délai d’un mois après la notification de la répartition des frais et n’est réputée présentée qu’après paiement de la taxe de réexamen de 100 EUR (annexe I A, paragraphe 33, du RMUE).