OPPOSITION n° B 2 326 190
Chanel, Société par Actions Simplifiée, 135, avenue Charles de Gaulle, 92200 Neuilly sur Seine Cédex, France (opposante), représentée par Sylvie Harding, 135, avenue Charles de Gaulle, 92521 Neuilly sur Seine Cédex, France (mandataire agréé)
c o n t r e
Annie International Inc., 500 Church Road, North Wales Pennsylvania 19454-4106, États-Unis d’Amérique (demanderesse), représentée par Lane IP Limited, 2 Throgmorton Avenue, EC2N 2DG London, Royaume-Uni (mandataire agréé).
Le 20/09/2017, la division d’opposition rend la présente
DÉCISION:
1. L’opposition n° B 2 326 190 est accueillie pour tous les produits contestés.
2. La demande de marque de l’Union européenne n° 12 237 251 est rejetée dans son intégralité.
3. La demanderesse supporte les frais, fixés à 650 EUR.
MOTIFS:
L’opposante a formé une opposition à l’encontre de tous les produits visés par la demande de marque de l’Union européenne n° 12 237 251, « NANACOCO ». L’opposition est fondée sur l’enregistrement français n° 1 571 046, « COCO ». L’opposante a invoqué l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE.
PREUVE DE L’USAGE
En vertu de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du RMUE (dans la version en vigueur au moment du dépôt de l’opposition), sur requête de la demanderesse, l’opposante apporte la preuve qu’au cours des cinq années qui précèdent la date de publication de la marque contestée, la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans les territoires où elle est protégée au regard des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage. La marque antérieure peut faire l’objet d’une demande de preuve de l’usage si, à cette date, elle était enregistrée depuis cinq ans au moins.
En vertu de cette même disposition, en l’absence de cette preuve, l’opposition est rejetée.
La demanderesse a demandé à l’opposante de fournir la preuve de l’usage de la marque sur laquelle l’opposition est fondée.
La demande a été présentée en temps utile et elle est recevable dans la mesure où la marque antérieure a été enregistrée plus de cinq ans avant.
La marque contestée a été publiée le 09/12/2013. L’opposante était par conséquent tenue de prouver que la marque sur laquelle l’opposition était fondée avait fait l’objet d’un usage sérieux en France du 09/12/2008 au 08/12/2013 inclus.
Ces éléments de preuve doivent en outre démontrer l’usage de la marque en relation avec les produits sur le fondement desquels l’opposition a été formée, à savoir ceux qui suivent:
Classe 3: Savons, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux.
Conformément à la règle 22, paragraphe 3, du REMUE, la preuve de l’usage comprend des indications sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure pour les produits et services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée.
Le 27/07/2016, conformément à la règle 22, paragraphe 2, du REMUE, l’Office a donné à l’opposante jusqu’au 27/09/2016 pour fournir des preuves de l’usage de la marque antérieure. L’opposante a produit des preuves de l’usage le 26/09/2016 (dans le délai imparti).
Les éléments de preuve qui seront pris en considération se composent des documents suivants:
- Factures: Nombreuses factures datées entre décembre 2008 et avril 2013 émises par l’opposante et adressées à des entreprises établies dans divers départements français (75, 20, 67, 59, 95, 33, 44, 50, 22, 45). Les factures mentionnent notamment les produits suivants :
- « COCO eau de parfum vaporisateur », « COCO émulsion hydratante pour le corps », « COCO gel moussant », « COCO gel moussant pour la douche », « COCO savon pour le bain », « COCO parfum vaporisateur », « COCO déodorant vaporisateur », « COCO crème pour le corps »;
- « COCO MADEMOISELLE parfum », « COCO MADEMOISELLE eau de parfum », « COCO MADEMOISELLE eau de toilette », « COCO MADEMOISELLE savon pour le bain », « COCO MADEMOISELLE parfum pour les cheveux », « COCO MADEMOISELLE crème pour le corps », « COCO MADEMOISELLE brume fraîche pour le corps », « COCO MADEMOISELLE gel moussant pour la douche »;
- « COCO NOIR eau de parfum »
- « ROUGE COCO SHINE », « ROUGE COCO PERLE », « ROUGE COCO PARIS », « ROUGE COCO VENISE ».
- Catalogues de produits: Catalogue des produits vendus sous les marques « COCO MADEMOISELLE », « COCO » et « COCO NOIR » pour l’année 2013. Index d’un catalogue Chanel de 2013, lequel fait apparaitre sous la section « LES LEVRES », notamment les produits suivants : « ROUGE COCO », « ROUGE COCO BAUME », « ROUGE COCO SHINE » et les différentes gammes de ces produits, par exemple, « ROUGE COCO MADEMOISELLE », « ROUGE COCO CHALYS » etc. Catalogue Chanel de mai 2011 comprenant une publicité pour le parfum « COCO MADEMOISELLE » et une publicité pour le rouge à lèvres « ROUGE COCO shine ». Catalogue Chanel mai 2010 contenant un article intitulé « IL EST SUR TOUTES LES LÈVRES », lequel traite du « ROUGE COCO » dans les termes suivants : « tout l’esprit de Coco Chanel dans un Rouge à Lèvres ». Extrait d’un catalogue Chanel de 2008 comportant des photos de l’eau de parfum et de l’eau de toilette « COCO MADEMOISELLE ».
- Extraits de site internet: Extrait du site internet de l’opposante daté du 22/01/2016 faisant apparaitre les résultats de la recherche pour le mot « COCO ». Les résultats comprennent des photographies de produits accompagnées de leurs prix exprimés en euros. On y voit les produits suivants :
- un rouge à lèvres désigné sous le terme « ROUGE COCO »,
- un parfum, une eau de toilette, un déodorant, une crème pour le corps, une émulsion hydratante et une brume fraiche pour le corps étiquetés « COCO MADEMOISELLE » et encore un savon « COCO MADEMOISELLE » sur lequel le mot « COCO » est gravé,
- un parfum, une eau de parfum, un gel moussant pour le bain, une crème pour le corps et une émulsion hydratante vendus sous le signe « COCO NOIR »,
- une eau de parfum, un rouge à lèvres, une eau de toilette, un savon pour le bain, un gel moussant pour la douche, un déodorant, une crème pour le corps, une émulsion hydratante pour le corps désignés sous le signe « COCO ».
- Articles de presse: Article de source indéterminée daté du 26/04/2010 et intitulé « CHANEL ROUGE COCO élue campagne préférée des français ». Extrait du magazine Voici paru le 23 avril 2011, intitulé « Kate Middleton vide son sac » qui montre la photo d’un rouge à lèvres avec l’explication suivante : « Un sourire qui vibre avec le rouge « CocoShine ». Extrait du magazine MODZIK paru en janvier/février 2013 dans lequel on peut lire sous la section beauté et sous le titre « Les fleurs du mal », ce qui suit : « Après Coco et Coco Mademoiselle, Coco Noir s’impose […] ». Extrait de M LE MAGAZINE DU MONDE paru le 9 février 2013 dans lequel on peut voir une photo d’un parfum « COCO MADEMOISELLE ». Extrait du magazine MARIONS-NOUS paru en mars 2013 et intitulé « Déferlante noire » dans lequel apparait une photo du parfum « COCO NOIR ». Extrait de Femme Magazine paru en avril 2013 consacrant un article au nouveau format du parfum « Coco Mademoiselle ». Première page du No 895 de VOGUE spécial Coco Chanel – UNE ALLURE AU PRÉSENT paru en mars 2009. Extrait de Cosmétiquemag paru en mai 2013 comportant un « DOSSIER PARFUM » au sein duquel un article traite notamment du parfum « Coco Noir ».
- Sondage d’opinion: Sondage de l’IFOP apparemment réalisé en 2013 sur un échantillon composé de 300 consommateurs français selon lequel 100% des personnes interrogées reconnaitraient spontanément la fragrance de « COCO MADEMOISELLE ».
- Récompenses: Article extrait de Wikipédia le 27/06/2013 sur les « FiFi Awards » aux termes duquel, la récompense FiFi a été attribuée à la ligne bain et corps de « Coco Mademoiselle » en 2011 et au parfum « Coco Mademoiselle » en 2002 pour leur fragrance. Il est en outre mentionné qu’elle a été attribuée au parfum « Coco » en 1986, pour son conditionnement.
Analyse de la preuve de l’usage
S’agissant du territoire de l’usage, la division d’opposition observe que les documents présentés par l’opposante, en particulier les factures, les articles de presse et l’extrait du site internet de l’opposante montrent que le lieu de l’usage est la France. Cela peut être déduit de la langue des documents (le français), de la devise mentionnée sur les factures ainsi que sur l’extrait du site internet de l’opposante (Euros) et des adresses en France indiquées sur lesdites factures. Par conséquent, les preuves concernent le territoire pertinent.
Concernant la période de l’usage, il convient de relever que la plupart des éléments de preuve sont datés dans la période pertinente. En outre, le document daté postérieurement à la période pertinente, à savoir, l’extrait du site internet de l’opposante confirme l’usage de la marque de l’opposante pendant la période pertinente. En effet, dès lors que cet extrait est daté postérieurement à la période pertinente, il est approprié aux fins de confirmer l’usage que les factures démontrent sur l’ensemble de la période pertinente (dans ce sens, 27/01/2004, C-259/02, Laboratoire de la mer, EU:C:2004:50). Par conséquent, les preuves concernent la période pertinente.
S’agissant de l’importance de l’usage, les documents présentés, en particulier les factures et les extraits de presse fournissent à la division d’opposition des informations suffisantes concernant le volume commercial, la portée territoriale, la durée et la fréquence de l’usage.
Il ressort en effet de la documentation présentée prise dans son ensemble que le signe « Coco » a été utilisée dès 1986 et qu’un tel usage s’est poursuivi pendant et après la période pertinente. Cet usage peut donc être qualifié d’usage de longue durée.
Enfin, il ressort notamment des factures et des divers articles de presse consacrés aux produits désignés sous les signes précités, non seulement que cet usage a été fréquent et régulier, mais encore – eu égard aux quantités mentionnées sur les factures – qu’il a généré des revenus substantiels.
Cet usage peut donc être qualifié d’important eu égard au fait que les factures ne sont présentées qu’à titre illustratif, ainsi qu’il ressort de leur numérotation, qui sont espacées les unes des autres (27/02/2015, T-41/12, L'Wren Scott, EU:T:2015:125, § 41 et 42; 24/05/2012, T-152/11, MAD, EU:T:2012:263, § 65).
L’importance de l’usage a donc été prouvée.
Concernant la nature de l’usage, la division d’opposition rappelle que dans le cadre de la règle 22, paragraphe 3, du REMUE, l’expression « nature de l’usage » inclut les éléments de preuve de l’usage du signe en tant que marque dans la vie des affaires, de l’usage de la marque telle qu’enregistrée ou d’une variation de celle-ci conformément à l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, point a), du RMUE ainsi que de son usage pour les produits et services pour lesquels elle est enregistrée.
En l’espèce, la demanderesse allègue que l’opposante n’a pas prouvé l’usage de la marque antérieure « Coco » mais des signes « Coco Mademoiselle », « Coco Rouge » et « Coco Noir », une partie desquels sont des marque enregistrées dans plusieurs pays de l’Union européenne dont l’opposante est titulaire. Elle apporte en outre des documents au soutien de cette prétention, à savoir, des extraits de bases de données officielles montrant que l’opposante est titulaire de marques « Coco Mademoiselle », « Coco Rouge » et « Coco Noir » dans divers pays de l’Union européenne.
À cet égard, il convient de relever tout d’abord que selon l’article 15, paragraphe 1, 2ème alinéa, point a), du RMUE, « sont également considérés comme usage au sens du paragraphe 1: a) l’emploi de la marque de l’Union européenne sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée, que la marque soit ou non aussi enregistrée sous la forme utilisée au nom du titulaire ». Lors de l’examen de l’usage d’un enregistrement antérieur national aux fins de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du RMUE, l’article 15 du RMUE peut être appliqué, par analogie, afin de vérifier si l’usage du signe constitue ou non un usage sérieux de la marque antérieure en ce qui concerne sa nature.
Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que selon une jurisprudence constante, si un ajout n’est pas distinctif ou non dominant, cela n’altère pas le caractère distinctif de la marque enregistrée (30/11/2009, T-353/07, Coloris, EU:T:2009:475, § 29-33 et suivants; 10/06/2010, T-482/08, Atlas Transport, EU:T:2010:229, § 36 et suivants).
En l’espèce, c’est à bon droit que l’opposante souligne que les éléments verbaux ajoutés à la marque antérieure verbale « Coco » sont descriptifs et donc non distinctifs puisque le terme « Mademoiselle » décrit le public visé par la ligne « Mademoiselle » de « Coco », à savoir un public plus jeune, de demoiselles, le terme « Rouge » est un terme couramment utilisé pour décrire les rouges à lèvres en rapport avec lesquels le signe « Rouge Coco » est utilisé (un exemple d’une telle utilisation est illustré par le contenu de l’article paru le 23 avril 2011 dans le magazine Voici) et le terme « Noir » désigne la couleur du conditionnement des parfums et des cosmétiques commercialisés sous le signe « Noir ».
Dès lors qu’en l’espèce, les mots parfois ajoutés à la marque antérieure « Coco », à savoir, « Mademoiselle », « Rouge » et « Noir », ne sont pas distinctifs dans la perception du public pertinent, ils ne peuvent altérer le caractère distinctif de la marque antérieure telle qu’elle est enregistrée.
La même considération s’applique par ailleurs aux termes désignant les différentes teintes de « Rouge Coco », à savoir, « Baume », « Venise », « Paris », « Mademoiselle » etc. puisque ces termes ne se verront pas attribuer une fonction d’indication d’origine des rouges à lèvres « Coco » par le consommateur français.
Compte tenu des éléments qui précèdent, la division d’opposition considère que les éléments de preuve démontrent l’usage du signe tel qu’enregistré au sens de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, point a), du RMUE contrairement à ce qu’avance la demanderesse.
Par conséquent, les documents fournis par l’opposante sont suffisants pour prouver l’usage sérieux de la marque antérieure pendant la période pertinente sur le territoire pertinent.
Toutefois, les preuves présentées par l’opposante ne démontrent pas un usage sérieux de la marque pour tous les produits couverts par ladite marque antérieure.
Aux termes de l’article 42, paragraphes 2 et 3 du RMUE, si la marque antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou services.
Conformément à la jurisprudence en la matière, il convient de tenir compte des éléments suivants lors de l’application de la disposition susvisée
« …si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou services n’emporte protection, dans une procédure d’opposition, que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée. En revanche, si une marque a été enregistrée pour des produits ou services définis de façon tellement précise et circonscrite qu’il n’est pas possible d’opérer des divisions significatives à l’intérieur de la catégorie concernée, alors, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour lesdits produits ou services couvre nécessairement toute cette catégorie aux fins de l’opposition.
En effet, si la notion d’usage partiel a pour fonction de ne pas rendre indisponibles des marques dont il n’a pas été fait usage pour une catégorie de produits donnée, elle ne doit néanmoins pas avoir pour effet de priver le titulaire de la marque antérieure de toute protection pour des produits qui, sans être rigoureusement identiques à ceux pour lesquels il a pu prouver un usage sérieux, ne sont pas essentiellement différents de ceux-ci et relèvent d’un même groupe qui ne peut être divisé autrement que de façon arbitraire. Il convient à cet égard d’observer qu’il est en pratique impossible au titulaire d’une marque d’apporter la preuve de l’usage de celle-ci pour toutes les variantes imaginables des produits concernés par l’enregistrement. Par conséquent, la notion de «partie des produits ou services» ne peut s’entendre de toutes les déclinaisons commerciales de produits ou de services analogues, mais seulement de produits ou de services suffisamment différenciés pour pouvoir constituer des catégories ou sous-catégories cohérentes.»
(14/07/2005, T-126/03, Aladin, EU:T:2005:288).
En l’espèce, les éléments de preuve prouvent l’usage de la marque antérieure « Coco » pour les produis suivants : des parfums, des eaux de parfums, des eaux de toilette, des rouges à lèvres, des crèmes, brumes et émulsions pour le corps, des déodorants, des savons et des gels moussants.
Les savons sont couverts en tant que tel par la marque antérieure. L’usage a donc été prouvé pour ces produits.
Par ailleurs, les parfums, les eaux de parfums et les eaux de toilette pour lesquels l’usage du signe « Coco » a été prouvé appartiennent à la catégorie générale parfumerie couverte par la marque antérieure.
Enfin, les rouges à lèvres, crèmes, brumes et émulsions pour le corps, déodorants et gels moussants – dès lors qu’ils sont des préparations destinées à nettoyer, protéger, parfumer, maintenir en bon état le corps, à en modifier ou en embellir l’aspect – appartiennent à la catégorie générale cosmétiques couverte par la marque antérieure.
Étant donné que l’opposante n’est pas tenue de produire la preuve pour toutes les variations concevables des catégories générales parfumerie et cosmétiques pour lesquelles la marque antérieure est enregistrée et étant donné que les produits susmentionnées ne constituent pas des sous-catégories cohérentes à l’intérieur des catégories générales parfumerie et cosmétiques de la spécification auxquelles ils appartiennent, la division d’opposition considère que les éléments de preuve montrent un usage sérieux de la marque pour les catégories générales parfumerie et cosmétiques.
Par conséquent, lors de l’examen de l’opposition, la division d’opposition prendra en considération les produits suivants : savons, parfumerie, cosmétiques.
RISQUE DE CONFUSION – ARTICLE 8, PARAGRAPHE 1, POINT b), DU RMUE
On entend par risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause, à condition de porter les marques en cause, proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. L’existence d’un risque de confusion doit être appréciée globalement en tenant compte de plusieurs facteurs interdépendants. Ces facteurs incluent la similitude des signes, la similitude des produits et services, le caractère distinctif de la marque antérieure, les éléments distinctifs et dominants des signes en litige et le public pertinent.
- Les produits
Les produits pour lesquels l’usage de la marque antérieure a été prouvé et donc, sur lesquels est fondée l’opposition sont:
Classe 3: Savons, parfumerie, cosmétiques.
Les produits contestés sont les suivants:
Classe 3: Produit pour masquer les imperfections du visage; Produits cosmétologiques; Rouges à lèvres à usage cosmétique; Cosmétiques; Maquillage pour les yeux; Fards à paupières; Fond de teint; Brillants à lèvres; Rouge à lèvres; Lotions pour la peau; Laques pour les ongles; Crèmes non médicinales pour la peau.
Les cosmétiques contestés sont couverts de manière identique par la marque antérieure.
Par ailleurs, le reste des produits contestés, à savoir les suivants : produit pour masquer les imperfections du visage; produits cosmétologiques; rouges à lèvres à usage cosmétique; maquillage pour les yeux; fards à paupières; fond de teint; brillants à lèvres; rouge à lèvres; lotions pour la peau; laques pour les ongles; crèmes non médicinales pour la peau, étant des préparations destinées à nettoyer, protéger, parfumer, maintenir en bon état le corps, à en modifier ou en embellir l’aspect, ils peuvent être qualifiés de cosmétiques. Il s’ensuit que ces produits contestés sont inclus dans la catégorie générale des cosmétiques couverts par la marque antérieure. Ces produits sont donc identiques.
- Public pertinent – niveau d’attention
Le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a lieu également de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou services en cause.
En l’espèce, les produits jugés identiques s’adressent au grand public dont le niveau d’attention est moyen (21/02/2013, T-427/11, Bioderma, EU:T:2013:92, § 38; 14/04/2011, T-466/08, ACNO FOCUS, EU:T:2011:182, § 49).
- Les signes
COCO
|
NANACOCO
|
Marque antérieure |
Marque contestée |
Le territoire pertinent est la France.
L’appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci (11/11/1997, C–251/95, Sabèl, EU:C:1997:528, § 23).
Les marques en cause sont toutes deux des marques verbales composées d’un élément unique. La marque antérieure est constituée de l’élément « COCO » lequel pourra évoquer chez le consommateur français le fruit du cocotier ou la célèbre styliste française Gabrielle Chanel alias « Coco » Chanel. Dans l’un comme dans l’autre cas, ce terme n’ayant aucune relation avec les produits en cause, il sera perçu comme distinctif.
S’agissant de la marque contestée, même si celle-ci est composée d’un élément verbal unique, il ne peut être exclu tel que l’allègue l’opposante que les consommateurs français la décomposent en deux éléments, à savoir, « NANA » et « COCO » puisqu’ils suggèrent tous deux une signification concrète pour eux (13/02/2007, T-256/04, Respicur, EU:T:2007:46, § 57; 13/02/2008, T-146/06, Aturion, EU:T:2008:33, § 58).
En effet, et comme l’avance l’opposante, le mot « NANA » est un terme du langage familier par lequel on désigne une femme et le terme « COCO » véhicule la ou les significations mentionnées précédemment.
Dès lors que l’élément « NANA » constitue une allusion au public féminin visé par les cosmétiques en cause, c’est à bon droit que l’opposante souligne qu’il sera perçu comme étant faiblement distinctif.
Étant donné que le terme « COCO » a, lui, un caractère distinctif normal, il résulte de ce qui précède que cet élément sera perçu comme l’élément le plus distinctif de la marque contestée.
Sur les plans visuel et phonétique, les signes coïncident au niveau du mot « COCO ». Toutefois, ils diffèrent au niveau du mot « NANA ».
Étant donné que l’élément de différenciation entre les signes, à savoir, « NANA » a un caractère distinctif faible, il ne remet pas totalement en cause la similitude entre les signes crée par l’inclusion de la marque antérieure dans son intégralité au sein de la marque contestée. Par ailleurs, eu égard à ce faible caractère distinctif, l’argument de la demanderesse selon lequel le consommateur prêtera plus d’attention à l’élément « NANA » qu’à l’élément « COCO » simplement parce qu’il est placé en attaque, ne peut être accepté.
En conséquence, les signes présentent un degré moyen de similitude visuelle et phonétique.
Sur le plan conceptuel, il est fait référence aux affirmations précédentes concernant le contenu sémantique des marques. Les deux signes seront perçus comme faisant référence à la noix de « COCO » ou à « COCO » Chanel, ils sont donc similaires sur le plan conceptuel dans cette mesure. En revanche, ils diffèrent dans le concept d’une femme véhiculé par l’élément additionnel faiblement distinctif « NANA » de la marque contestée.
En conséquence, les signes présentent un degré élevé de similitude conceptuelle.
Dans la mesure où les signes présentent des similitudes au regard d’un aspect de la comparaison au moins, l’examen du risque de confusion sera réalisé.
- Caractère distinctif de la marque antérieure
Le caractère distinctif de la marque antérieure est l’un des facteurs à prendre en considération lors de l’appréciation globale du risque de confusion.
L’opposante n’a pas fait valoir explicitement que sa marque est particulièrement distinctive en raison de son usage intensif ou de sa renommée mais elle allègue que « le risque de confusion est d’autant plus élevé que la dénomination antérieure possède un caractère distinctif important soit intrinsèquement, soit en raison de sa connaissance par une partie significative du public concerné » et elle a présenté des preuves au soutien de sa prétention.
Cette allégation devrait être dûment examinée dans la mesure où le caractère distinctif de la marque antérieure fait partie des éléments à prendre en considération dans l’appréciation du risque de confusion. En effet, « le risque de confusion est d'autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s'avère important » et, par conséquent, les marques qui ont un caractère distinctif élevé en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d'une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (29/09/1998, C-39/97, Canon, EU:C:1998:442, § 18).
Toutefois, pour des raisons d’économie de procédure, il n’est pas nécessaire d’examiner en l’espèce les preuves déposées par l’opposante afin d’étayer cette assertion (voir ci-dessous, dans « Appréciation globale »).
Par conséquent, l’appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure reposera sur son caractère distinctif intrinsèque. En l’espèce, la marque antérieure dans son ensemble n’a de signification en rapport avec aucun des produits en cause du point de vue du public du territoire pertinent. Dès lors, conformément à la pratique de l’Office, le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure doit être considéré comme normal et non élevé comme le prétend l’opposante.
- Appréciation globale, autres arguments et conclusion
L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits et services peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement (29/09/1998, C-39/97, Canon, EU:C:1998:442, § 17).
Par ailleurs, il convient de rappeler que le risque de confusion désigne les situations dans lesquelles le consommateur confond directement les marques entre elles ou fait un rapprochement entre les signes en conflit et suppose que les produits désignés proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement.
En l’espèce, les produits sont identiques.
En outre, la marque antérieure « COCO » est totalement incluse dans la marque contestée. Certes, cette dernière inclue un élément additionnel « NANA ». Cependant, il a été observé que, dès lors qu’il est allusif du public féminin visé par les divers produits cosmétiques contestés, cet élément a un caractère distinctif faible. Il s’ensuit qu’il ne saurait à lui seul empêcher que les marques en conflit dans le cas présent soient confondues.
En effet, il est tout à fait concevable que le consommateur concerné perçoive la marque contestée comme une nouvelle gamme de cosmétiques « Coco » ou une nouvelle variante de cette marque antérieure (voir arrêt du 23/10/2002, T–104/01, Fifties, EU:T:2002:262, § 49).
Ayant égard à ce qui précède, il ne peut être exclu que le public français confronté à la marque contestée « NANACOCO » dans le contexte de produits identiques à ceux couverts par la marque antérieure « COCO » associe celle-ci à l’opposante.
À la lumière des éléments qui précèdent, il convient de conclure qu’il existe un risque de confusion entre les marques en cause en l’espèce dans l’esprit du public français, en ce inclut le risque d’association.
L’opposition est dès lors fondée sur la base de l’enregistrement français n° 1 571 046, « COCO » de l’opposante. Il en résulte que la marque contestée doit être rejetée pour tous les produits contestés.
FRAIS
Conformément à l’article 85, paragraphe 1, du RMUE, la partie perdante dans une procédure d’opposition supporte les frais et taxes exposés par l’autre partie.
La demanderesse étant la partie perdante, elle doit supporter la taxe d’opposition ainsi que les frais exposés par l’opposante aux fins de la présente procédure.
Conformément à la règle 94, paragraphes 3 et 6 et à la règle 94, paragraphe 7, point d), sous i), du REMUE, les frais à rembourser à l’opposante sont la taxe d’opposition et les frais de représentation dont le montant est fixé dans la limité du taux maximal déterminé dans le REMUE.
La division d’opposition
Marianna KONDAS |
Marine DARTEYRE |
Carmen SÁNCHEZ PALOMARES |
Conformément à l’article 59 du RMUE, toute partie lésée par cette décision peut former un recours à son encontre. Conformément à l’article 60 du RMUE, le recours doit être formé par écrit auprès de l’Office dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la présente décision. Il doit être déposé dans la langue de procédure de la décision attaquée. En outre, un mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé par écrit dans un délai de quatre mois à compter de cette même date. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours de 720 EUR.
Le montant déterminé lors de la répartition des frais ne peut être révisé que par une décision de la division d’opposition, sur requête. Conformément à la règle 94, paragraphe 4, du REMUE, la requête doit être présentée dans le délai d’un mois après la notification de la répartition des frais et n’est réputée présentée qu’après paiement de la taxe de réexamen de 100 EUR (annexe I A, paragraphe 33, du RMUE).