NUOMEDIS | Decision 2614884

OPPOSITION n° B 2 614 884

Médis – Companhia Portuguesa De Seguros De Saúde, S.A., Av. Dr. Mário Soares (Tagus Park), Edifício 10, Piso 1, 2744 Porto Salvo, Portugal (opposante), représentée par Gastão Da Cunha Ferreira, Lda., Rua dos Bacalhoeiros, nº. 4, 1100-070 Lisbonne, Portugal (mandataire agréé)

c o n t r e

Nuomedis AG, Gräubernstrasse 14, 4410 Liestal, Suisse (titulaire), représentée par Rüger, Barthelt & Abel, Webergasse 3, 73728 Esslingen, Allemagne (mandataire agréé).

Le 24/03/2017, la division d’opposition rend la présente

DÉCISION:

1.        L’opposition n° B 2 614 884 est rejetée dans son intégralité.

2.        L’opposante supporte les frais, fixés à 300 EUR.

MOTIFS:

L’opposante a formé une opposition à l’encontre de tous les produits et services visés par l’enregistrement international désignant l’Union européenne n° 1 236 612. L’opposition est fondée sur l’enregistrement de l’Union européenne n° 6 647 093 et sur les enregistrements portugais n° 339 011 et 519 701. L’opposante a invoqué l’article 8, paragraphe 1, point b), et l’article 8, paragraphe 5, du RMUE en relation avec les trois signes.

PREUVE DE L’USAGE

En vertu de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du RMUE (dans la version en vigueur au moment du dépôt de l’opposition), sur requête de la demanderesse/titulaire, l’opposante apporte la preuve qu’au cours des cinq années qui précèdent la date de publication de la marque contestée, la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans les territoires où elle est protégée au regard des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage. La marque antérieure peut faire l’objet d’une demande de preuve de l’usage si, à cette date, elle était enregistrée depuis cinq ans au moins.

En vertu de cette même disposition, en l’absence de cette preuve, l’opposition est rejetée.

Pour les enregistrements internationaux désignant l’Union européenne, on considère que la «date de publication» de la marque contestée au sens de l’article 42, paragraphe 2, du RMUE, c’est-à-dire aux fins de déterminer que la marque antérieure a été utilisée pendant une période de cinq ans, est six mois après la première republication de l’enregistrement international, ce qui correspond au début de la période d’opposition (article 156 du RMUE lu conjointement avec l’article 152 du RMUE, dans la version en vigueur au moment du dépôt de l’opposition). La marque antérieure peut faire l’objet d’une demande de preuve de l’usage si, à cette date, elle était enregistrée depuis cinq ans au moins.

La titulaire a demandé à l’opposante de fournir la preuve de l’usage de l’enregistrement de l’Union européenne n° 6 647 093 et de l’enregistrement portugais n° 339 011.

La demande a été déposée dans les délais.

S’agissant de l’enregistrement de l’Union européenne n° 6 647 093, la demande de preuve d’usage n’est pas recevable, dans la mesure où la marque antérieure était enregistrée pendant moins de cinq ans avant la date de cette demande.

S’agissant de l’enregistrement portugais n° 339 011, la demande est recevable. Le 10/08/2016, l’opposante a d’ailleurs été invitée à produire la preuve de l’usage requise dans un délai de deux mois.

Toutefois, l’opposante n’a pas produit d’éléments de preuve concernant l’usage de ladite marque antérieure. Elle n’a pas non plus invoqué de juste motif pour le non-usage.

En vertu de la règle 22, paragraphe 2, du REMUE, si l’opposante ne fournit pas cette preuve dans le délai imparti, l’Office rejette l’opposition.

L’opposition doit dès lors être rejetée en relation avec ladite marque antérieure portugaise conformément à l’article 42, paragraphes 2 et 3, du RMUE et à la règle 22, paragraphe 2, du REMUE.

RISQUE DE CONFUSION – ARTICLE 8, PARAGRAPHE 1, POINT b), DU RMUE

On entend par risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause, à condition de porter les marques en cause, proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. L’existence d’un risque de confusion doit être appréciée globalement en tenant compte de plusieurs facteurs interdépendants. Ces facteurs incluent la similitude des signes, la similitude des produits et services, le caractère distinctif de la marque antérieure, les éléments distinctifs et dominants des signes en litige et le public pertinent.

  1. Les produits et services

Les produits et services sur lesquels est fondée l’opposition sont:

Marque de l’Union européenne n° 6 647 093

Classe 9: Cartes magnétiques de crédit et de débit et cartes magnétiques pour opérations bancaires et opérations liées aux services de santé.

Classe 35: Services de publicité, diffusion de matériel publicitaire (prospectus, tracts et imprimés), étude de marché, aide à la direction d'entreprises, services de conseils pour la direction des affaires.

Classe 36: Assurances et services financiers y compris fournis par l'internet ou d'autres moyens de télécommunication.

Classe 38 : Services de télécommunications et de transmission électronique concernant le domaine financier.

Classe 44 : Fourniture de soins de santé, effectuée par des médecins, hôpitaux et autres prestataires de soins médicaux.

Marque portugaise n° 519 701

Classe 5: Marchandises pharmaceutiques et vétérinaires; produits hygiéniques à usage médical ; substances diététiques adaptées à usage médical ; aliments pour bébés ; emplâtres, matériel pour pansements ; matériaux d’obturation dentaire ; désinfectants.

Classe 10 : Appareils et instruments chirurgicaux, médicaux, dentaires et de vétérinaire ; membres, yeux et dents artificiels ; articles orthopédiques ; matériel de suture.

Classe 36 : Services d’assurance et financiers, notamment celles fournies par Internet ou tout autre moyen de communication.

Classe 44 : Fournisseur de services de soin de santé, intégré par des médecins, des hôpitaux et d’autres soins médicaux.

Les produits et services contestés sont les suivants:

Classe 9: Appareils et instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, photographiques, cinématographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection), de secours (sauvetage) et d'enseignement; appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l'accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique; appareils pour l'enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images; supports d'enregistrement magnétiques, disques acoustiques; disques compacts, DVD et autres supports d'enregistrement numériques; mécanismes pour appareils à prépaiement; caisses enregistreuses, machines à calculer, équipements pour le traitement d'informations, ordinateurs; logiciels; extincteurs.

Classe 10: Appareils et instruments chirurgicaux, médicaux, dentaires et vétérinaires, membres, yeux et dents artificiels; articles orthopédiques; matériel de suture.

Classe 42: Services scientifiques et technologiques ainsi que services de recherches et de conception y relatifs; services d'analyses et de recherches industrielles; conception et développement d'ordinateurs et de logiciels.

Classe 44 : Services médicaux; services vétérinaires; soins d'hygiène et de beauté pour êtres humains ou pour animaux; services d'agriculture, d'horticulture et de sylviculture.

Certains des produits et services contestés sont identiques aux produits et services sur lesquels se fonde l’opposition. Par souci d’économie de procédure, la division d’opposition ne procédera pas à une comparaison complète des produits et services énumérés ci-dessus. L’examen de l’opposition sera effectué comme si tous les produits et services contestés étaient identiques à ceux de la marque antérieure.

  1. Public pertinent – niveau d’attention

Le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a lieu également de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou services en cause.

En l’espèce, les produits et services présumés identiques s’adressent en partie au grand public, par exemple certains produits électroniques en classe 9 ou des services d’hygiène et de beauté en classe 44, et en partie à un public constitué de professionnels, par exemple les services en classe 42 et la majorité des produits en classe 10.

Le niveau d’attention est susceptible de varier entre moyen pour la plupart, et plus élevé pour d’autres, notamment les produits relativement chers comme les ordinateurs, les produits et services médicaux et vétérinaires qui peuvent avoir un impact sur l’état de santé du consommateur ou de son animal, ou encore les services de recherche dont l’enjeu est important dans un environnement très concurrentiel.

  1. Les signes

Marque de l’Union européenne n° 6 647 093

(marque antérieure 1)

Marque portugaise n° 519 701 (marque antérieure 2)

Médis

NUOMEDIS

Marques antérieures

Marque contestée

Le territoire pertinent est, d’une part, l’Union européenne et, d’autre part, le Portugal.

L’appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci (11/11/1997, C251/95, Sabèl, EU:C:1997:528, § 23).

L’élément individualisé « Médis » des marques antérieures n’appartient au vocabulaire d’aucune des langues pertinentes. Cependant, au vu de sa quasi coïncidence avec les abréviations « MEDI » et « MED », largement utilisées dans la grande majorité des langues, ce terme sera perçu comme une claire allusion à « médical » par les publics pertinents (08/02/2013, T-33/12, Medigym, EU:T:2013:71, § 49; 12/07/2012, T-470/09, Medi, EU:T:2012:369, § 25). En outre, il se révèle fortement allusif voire peu distinctif avec les produits et services en classes 10 et 44.

La marque antérieure 1 contient par ailleurs une croix verte stylisée qui est allusive aux services en classe 44, à savoir divers services médicaux et de santé. En effet, celle-ci sert notamment d’enseigne aux pharmacies dans divers pays. En outre, elle peut également renforcer la perception de « Médis » comme se référant à médical.

S’agissant du fond bleu de la marque antérieure 1, on relèvera qu’il est parfaitement basique et qu’il rappelle une étiquette. Dès lors, il engendrera un impact peu marquant aux yeux du public.

Le signe contesté ne comporte quant à lui aucun élément qui pourrait être considéré comme étant clairement plus distinctif que les autres. En particulier, dès lors que « NUOMEDIS » constitue une unité qui ne possède de sens dans aucune des langues des territoires pertinents, il ne sera pas décomposé par le public. En d’autres termes, l’élément « MEDIS », qui n’est par ailleurs pas un mot existant comme vu ci-avant, ne sera pas isolé ni reconnu dans une telle configuration.

Sur le plan visuel, les signes coïncident par la suite de lettres « MEDIS ». Ils diffèrent par l’accent aigu sur le « e » de « Médis » dans les marques antérieures, par les lettres « NUO » précédant « MEDIS » dans la marque contestée et par les éléments figuratifs de la marque antérieure 1 (croix stylisée verte sur fond d’un rectangle bleu).

Il convient particulièrement de relever que la partie coïncidente « MEDIS » ne constitue pas une unité autonome et individualisée dans le signe contesté. Autrement dit, la marque antérieure ne se détache pas dans le signe contesté.

Par ailleurs, on rappellera que les consommateurs ont généralement tendance à se concentrer sur le début d’un signe lorsqu’ils sont confrontés à une marque. Cette tendance s’explique par le fait que le public lit de gauche à droite, ce qui fait que la partie placée à la gauche du signe (la partie initiale) est celle qui attire en premier lieu l’attention du lecteur.

Partant, les signes présentent un faible degré de similitude visuelle.

Sur le plan phonétique, indépendamment des différentes règles de prononciation dans différentes parties des territoires pertinents, la prononciation des signes coïncide par les deux syllabes /ME-DIS/.

La prononciation diffère par les deux syllabes supplémentaires /NU-O/ du signe contesté, qui sont placées dans une position initiale plus impactante et qui n’ont pas de contreparties respectives dans les marques antérieures.

En outre, la présence d’un accent aigu sur le /e/ des marques antérieures est susceptible d’induire des variations de prononciation pour une partie du public.

En conséquence, les signes présentent un faible degré de similitude.

Sur le plan conceptuel, bien que le public des territoires pertinents perçoive dans les marques antérieures une référence au domaine médical, comme expliqué ci-dessus, le signe contesté est dépourvu de signification. L’un des signes n’étant associé à aucune signification, les signes ne sont pas similaires sur le plan conceptuel.

Dans la mesure où les signes présentent des similitudes au regard d’un aspect de la comparaison au moins, l’examen du risque de confusion sera réalisé.

  1. Caractère distinctif des marques antérieures

Le caractère distinctif de la marque antérieure est l’un des facteurs à prendre en considération lors de l’appréciation globale du risque de confusion.

Selon l’opposante, les marques antérieures jouissent d’une capacité distinctive très forte et sont notoires au Portugal pour une partie des produits et services pour lesquelles elles ont été enregistrées, c’est-à-dire pour les services revendiqués en classes 36 et 44. Cette allégation doit être dûment examinée dans la mesure où le caractère distinctif de la marque antérieure fait partie des éléments à prendre en considération dans l’appréciation du risque de confusion. En effet, «le risque de confusion est d'autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s'avère important» et, par conséquent, les marques qui ont un caractère distinctif élevé en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d'une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (29/09/1998, C-39/97, Canon, EU:C:1998:442, § 18).

L’opposante a produit les preuves suivantes:

  • Un extrait d’une publication présentant « Médis » élue marque de confiance 2015 au Portugal par les lecteurs du Reader’s Digest. Le document informe que cette marque est active dans le domaine des assurances de santé depuis de très nombreuses années. (Pièce n° 3)

  • Deux études de 2015 en portugais, l’une effectuée par Marcas que Marcam (enquête fondée sur la réputation de marques, Pièce n° 4) et l’autre réalisée par Nielsen (Pièce n° 5), présentant la marque « Médis » comme l’assurance santé avec la marque la plus forte et également en première position s’agissant de la notoriété pour la catégorie « assurances de santé ». Selon l’étude de marché Nielsen, « Médis » est considérée comme l’assurance santé la plus prestigieuse.

  • Dix factures datées de 2014 et 2015 pour un montant total de 92.991‚63 € d’investissements publicitaires et de sponsoring pour « Médis ». (Pièce n° 6)

  • Plusieurs exemples des print screens de vidéos sur Youtube de campagnes publicitaires. (Pièce n° 7)

  • Deux documents datés de 2015 et 2006 présentant « Médis » comme ayant acquis au Portugal le label « superbrands », superbrands étant une organisation internationale indépendante qui se dédie à la promotion de marques d’excellence dans 59 pays. (Pièces n° 8 et 11)

  • Deux documents relatant que la marque « Médis » a été considérée comme marque de confiance en 2015 au Portugal et qu’elle a été classée première dans le Marktest Reputation Index en 2013 dans la catégorie assurances au Portugal également. (Pièces n° 9 et10)

Après examen des pièces susvisées, la division d’opposition conclut que les marques antérieures ont acquis un caractère distinctif élevé par l’usage qui en a été fait sur le marché.

En effet, il ressort notamment clairement de plusieurs enquêtes interdépendantes et  distinctions que « Médis » bénéficie d’une connaissance et réputation très importante au Portugal dans le domaine des assurances de santé. Les dites enquêtes placent même la marque comme la plus connue et leader du secteur.

Partant, les signes ont acquis un caractère distinctif élevé au Portugal pour les services suivants :

Classe 36 : Assurances de santé.

Toutefois, dès lors que ces services ne sont similaires ou identiques à aucun des produits et services contestés, le caractère distinctif élevé constaté ci-avant ne saurait être pris en compte dans le cas présent.

En effet, les produits contestés en classes 9 et 10, sont pour des raisons évidentes différents de services d’assurances de santé. Les services scientifiques, technologiques, informatiques, médicaux, agricoles et de beauté que constituent les classes 42 et 44 contestées n’ont pas non plus de lien avec les dites assurances, dès lors qu’ils sont de nature et destination différentes, qu’ils ne sont pas fournis par les mêmes entreprises et qu’ils ne sont pas complémentaires. Sur ce dernier point, le fait par exemple que les prestataires de services médicaux ou de soins cosmétiques puissent recourir aux services d’assurance de la partie opposante ne constitue pas une similarité en soi et n'implique pas qu'ils soient complémentaires parce que le lien entre eux n'est pas assez direct.

  1. Appréciation globale, autres arguments et conclusion

L’article 8, paragraphe 1, point b) du RMUE dispose que «la marque demandée est refusée à l’enregistrement: […] lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.»

L’appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci. Par ailleurs, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails » (11/11/1997, C 251/95, Sabèl, EU:C:1997:528, § 23)

En outre, l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits et services peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement (29/09/1998, C39/97, Canon, EU:C:1998:442, §

17).

En l’espèce, les signes ne se révèlent que faiblement similaires tant sur le plan visuel que phonétique. En outre, ils ne sont pas similaires conceptuellement.

En particulier, l’élément des signes antérieurs « Médis » ne sera pas reconnu dans le signe contesté. En effet, il ne sera pas perçu comme une unité indépendante dans ce dernier, mais uniquement comme la partie finale non détachable et moins impactante du terme distinctif et sensiblement plus long « NUOMEDIS ». Par ailleurs, on ne saurait négliger l’impact non négligeable de l’ajout d’un accent aigu dans les marques antérieures.

Compte tenu de ce qui précède, même si les produits et services étaient identiques, il n’existe pas de risque de confusion dans l’esprit du public. Il y a donc lieu de rejeter l’opposition.

RENOMMÉE – ARTICLE 8, PARAGRAPHE 5, DU RMUE

Conformément à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE, sur opposition de la titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque contestée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d'une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

Il résulte de ce qui précède que les motifs de refus prévus à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE ne sont applicables que si les conditions suivantes sont remplies :

  • les signes doivent être identiques ou similaires ;

  • la marque de l’opposante doit être renommée. La renommée doit également être antérieure au dépôt de la marque contestée ; elle doit exister dans le territoire concerné et pour les produits et/ou services pour lesquels l’opposition a été formée ;

  • risque de préjudice : l’usage de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice.

Les conditions susvisées sont cumulatives et l’absence de l’une d’elles entraîne donc le rejet de l’opposition au titre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE (16/12/2010, T-345/08, et T-357/08, Botolist / Botocyl, EU:T:2010:529, § 41). Il y a lieu de noter, toutefois, que le fait que toutes les conditions susvisées soient remplies peut ne pas suffire. En effet, l’opposition peut encore être rejetée si la titulaire démontre un juste motif pour l’usage de la marque contestée.

  1. Risque de préjudice

L’usage de la marque contestée relève de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE lorsqu’une ou plusieurs des situations suivantes surviennent :

  • la marque contestée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ;

  • la marque contestée porte préjudice à la renommée de la marque antérieure

  • la marque contestée porte préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure.

Bien que le préjudice ou le profit indu puisse n’être que potentiel dans une procédure d’opposition, une simple possibilité ne suffit pas pour que l’article 8, paragraphe 5, du RMUE s’applique. Alors que la titulaire de la marque antérieure n’est pas tenue de démontrer l’existence d’une atteinte effective et actuelle à sa marque, elle doit «apporter des éléments permettant de conclure prima facie à un risque futur non hypothétique de profit indu ou de préjudice» (06/07/2012, T-60/10, Royal Shakespeare, EU:T:2012:348, § 53).

Il s’ensuit que l’opposante doit établir que le préjudice ou le profit indu est probable en ce sens qu’il est prévisible dans des circonstances normales. À cet effet, l’opposante doit apporter des preuves ou, à tout le moins, avancer une argumentation cohérente montrant en quoi consisterait et comment surviendrait le préjudice ou le profit indu qui pourrait conduire à conclure prima facie qu’un tel événement est effectivement probable dans des circonstances normales.

En l’espèce, en dehors du fait qu’elle invoque la renommée et qu’elle allègue que les signes sont similaires, l’opposante n’a produit ni fait, ni preuve, ni observation de nature à étayer la conclusion que l’usage de la marque contestée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.

L’article 8, paragraphe 5, du RMUE n’a pas pour objet d’empêcher l’enregistrement de toutes les marques identiques ou similaires à une marque renommée. Conformément à la jurisprudence constante, lorsque «la condition tirée de la renommée est remplie, [le juge] doit procéder à l’examen de la seconde condition, à savoir l’existence d’une atteinte sans juste motif à la marque antérieure» (14/09/1999, C-375/97, Chevy, EU:C:1999:408, § 30).

Comme indiqué plus haut, l’opposante aurait dû présenter des preuves ou, à tout le moins, avancer une argumentation cohérente démontrant en quoi consisterait et comment surviendrait le préjudice ou le profit indu, permettant de conclure prima facie que cet événement est, en effet, probable dans des circonstances normales.

La règle 19, paragraphe 2, point c), du REMUE, selon laquelle si l’opposition est fondée sur une marque renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE, l’opposante doit produire la preuve que la marque est renommée, ainsi que la preuve ou des observations dont il résulte que l’usage sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou lui porte préjudice, le confirme.

En l’espèce, l’opposante n’invoque même pas un éventuel risque de préjudice dans son mémoire d’opposition. Elle se contente d’invoquer l’article 8, paragraphe 5, du RMUE dans l’acte d’opposition et de prétendre dans ses écrits que le risque de confusion serait aggravé au vu du prétendu caractère notoire et de grand prestige des marques antérieures au Portugal. Il ne semble toutefois pas y avoir de bonne raison de supposer que l’usage de la marque contestée aboutira à ces résultats. On ne saurait effectivement exclure totalement qu’un préjudice ou un profit indu puisse éventuellement se produire. Cependant, comme indiqué plus haut, cela ne suffit pas.

Conformément à l’article 76, paragraphe 1, du RMUE, au cours de la procédure, l’Office procède à l’examen d’office des faits ; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus de la marque contestée, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.

Étant donné que l’opposante n’a pas été en mesure d’avancer une bonne raison permettant de conclure que l’usage du signe contesté tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures ou qu’il leur porterait préjudice, l’opposition n’est pas considérée comme bien fondée au titre de l’article 8, paragraphe 5, du RMUE.

FRAIS

Conformément à l’article 85, paragraphe 1, du RMUE, la partie perdante dans une procédure d’opposition supporte les frais et taxes exposés par l’autre partie.

L’opposante étant la partie perdante, elle doit supporter les frais exposés par la titulaire aux fins de la présente procédure.

Conformément à la règle 94, paragraphe 3 et à la règle 94, paragraphe 7, point d), sous ii), du REMUE, les frais à rembourser à la titulaire sont les frais de représentation dont le montant est fixé dans la limite du taux maximal déterminé dans le REMUE.

La division d’opposition

 Sonia MEHANNEK 

Steve HAUSER

 Frédérique SULPÏCE

Conformément à l’article 59 du RMUE, toute partie lésée par cette décision peut former un recours à son encontre. Conformément à l’article 60 du RMUE, le recours doit être formé par écrit auprès de l’Office dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la présente décision. Il doit être déposé dans la langue de procédure de la décision attaquée. En outre, un mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé par écrit dans un délai de quatre mois à compter de cette même date. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours de 720 EUR.

Le montant déterminé lors de la répartition des frais ne peut être révisé que par une décision de la division d’opposition, sur requête. Conformément à la règle 94, paragraphe 4, du REMUE, la requête doit être présentée dans le délai d’un mois après la notification de la répartition des frais et n’est réputée présentée qu’après paiement de la taxe de réexamen de 100 EUR (annexe I A, paragraphe 33, du RMUE).

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