E.T. 51 | Decision 2731266

OPPOSITION n° B 2 731 266

Pernod Ricard, société anonyme, 12, place des Etats-Unis, 75016 Paris, France (opposante), représentée par Pernod Ricard, SA, Eve-Marie Wilmann-Courteau, 12 place des Etats-Unis, 75016 Paris, France (employée)

c o n t r e

Notaboo Corp., 1513-77 University Crescent, Manitoba R3T 3N8, Canada (demanderesse), représentée par Vault IP Limited, Cavendish House 39 Waterloo Street Birmingham, Birmingham B2 5PP, Royaume-Uni (mandataire agréé).

Le 28/09/2017, la division d’opposition rend la présente

DÉCISION:

1.        L’opposition n° B 2 731 266 est accueillie pour tous les produits contestés.

2.        La demande de marque de l’Union européenne n° 15 299 639 est rejetée dans son intégralité.

3.        La demanderesse supporte les frais, fixés à 320 EUR.

MOTIFS:

L’opposante a formé une opposition à l’encontre de tous les produits visés par la demande de marque de l’Union européenne n° 15 299 639, E.T. 51 (marque verbale). L’opposition est fondée sur notamment l’enregistrement français n° 1 698 173,  (marque figurative). L’opposante a invoqué l’article 8, paragraphe 1, point b), et paragraphe 5, du RMUE.

RISQUE DE CONFUSION – ARTICLE 8, PARAGRAPHE 1, POINT b), DU RMUE

On entend par risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause, à condition de porter les marques en cause, proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. L’existence d’un risque de confusion doit être appréciée globalement en tenant compte de plusieurs facteurs interdépendants. Ces facteurs incluent la similitude des signes, la similitude des produits et services, le caractère distinctif de la marque antérieure, les éléments distinctifs et dominants des signes en litige et le public pertinent.

L’opposition est fondée sur plus d’une marque antérieure. La division d’opposition estime qu’il y a lieu d’examiner d’abord l’opposition par rapport à l’enregistrement français nº 1 698 173 de l’opposante.

  1. Les produits

Les produits sur lesquels est fondée l’opposition sont:

Classe 33: Apéritifs, spiritueux.

Les produits contestés sont les suivants:

Classe 32: Bières; Boissons sans alcool.

Classe 33: Vin; Spiritueux et liqueurs.

À titre de remarque préliminaire, il convient de noter que selon l’article 28, paragraphe 7, du RMUE, des produits et services ne sont pas considérés comme similaires ou différents au motif qu'ils apparaissent dans la même classe ou dans des classes différentes de la classification de Nice.

Les facteurs pertinents concernant la comparaison des produits ou services incluent, en particulier, leur nature et leur destination, leurs canaux de distribution, leurs points de vente, leur producteurs, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire.

Produits contestés dans la classe 32

Les bières contestées sont similaires aux apéritifs de la marque antérieure qui s’entendent de boissons généralement à base de vin (quinquina, vermouth) ou d'alcool (amer, anis…), supposées apéritives, que l'on prend avant le repas (dictionnaire Le Grand Robert de la langue française). Bien que leurs processus de production soient différents, ces produits appartiennent tous à la même catégorie de boissons alcooliques destinées au grand public. Ils peuvent être servis dans les bars et les restaurants et sont vendus dans les supermarchés et les épiceries. Ces boissons peuvent être trouvées dans les mêmes rayons des supermarchés, même s’il est possible d’observer une certaine distinction en fonction, par exemple, de leurs sous-catégories respectives. Parfois, les bières et les apéritifs peuvent être mélangées et consommées ensemble, par exemple dans des cocktails. De plus, ces produits peuvent provenir des mêmes entreprises.

Les boissons sans alcool contestées, comprises dans la classe 32, telles que les boissons de fruit, jus de fruit, eaux minérales et gazeuses, d’une part, et les apéritifs et spiritueux compris dans la classe 33, d’autre part, sont souvent vendus côte à côte, à la fois dans les magasins, les bars et sur les cartes des boissons. Ces produits s’adressent au même public, ont les mêmes modalités d’utilisation et peuvent être concurrents. Dès lors, ces produits sont similaires à un faible degré.

Produits contestés dans la classe33

Les spiritueux sont indiqués de façon identique dans les deux listes de produits.

Il existe un chevauchement entre les liqueurs contestées qui s’entendent de boissons alcoolisées, préparées sans fermentation, à partir d'alcool, de produits végétaux (plantes, fruits…) et de produits sucrés (même dictionnaire) et les apéritifs de l’opposante. Dans la mesure où il existe des liqueurs apéritives. Dès lors, ces produits sont identiques.

Les vins contestés sont similaires aux apéritifs. Bien que leurs processus de production soient différents, ces produits appartiennent tous à la même catégorie de boissons alcooliques destinées au grand public. Ils peuvent être servis dans les bars et les restaurants et sont vendus dans les supermarchés et les épiceries. Ces boissons peuvent être trouvées dans les mêmes rayons des supermarchés, même s’il est possible d’observer une certaine distinction en fonction, par exemple, de leurs sous-catégories respectives. De plus, ces produits peuvent provenir des mêmes entreprises et être concurrents.

  1. Public pertinent – niveau d’attention

Le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a lieu également de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou services en cause.

En l’espèce, les produits jugés identiques ou similaires à différents degrés s’adressent au grand public dont le niveau d’attention est moyen.

  1. Les signes  

Image de la marque

E.T. 51

Marque antérieure

Marque contestée

Le territoire pertinent est la France.

L’appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci (11/11/1997, C251/95, Sabèl, EU:C:1997:528, § 23).

Les marques en présence n’ont pas d’éléments pouvant être considérés comme manifestement plus distinctifs que d’autres éléments.

Sur le plan visuel, les signes coïncident au niveau du nombre « 51 ». Toutefois, ils diffèrent au niveau des lettres E et T de la marque contestée, chacune d’elles suivie d’un point. Les signes diffèrent également très légèrement au regard de la police d’écriture utilisée.

En conséquence, les signes présentent un degré moyen de similitude visuelle.

Sur le plan phonétique, les signes coïncident au niveau du nombre « 51 » qui sera prononcé « cinquante et un ». Toutefois, ils diffèrent au niveau de la prononciation des lettres E et T de la marque contestée. Les points ne seront pas prononcés.

En conséquence, les signes présentent un degré de similitude phonétique au-dessus de la moyenne.

Sur le plan conceptuel, la marque antérieure et le signe contesté reproduisent le nombre « 51 ». Les lettres E.T. n’ont pas de signification particulière. Dès lors, les signes sont conceptuellement hautement similaires dans la mesure où ils partagent le concept du nombre « 51 ».

Dans la mesure où les signes présentent des similitudes au regard d’un aspect de la comparaison au moins, l’examen du risque de confusion sera réalisé.

  1. Caractère distinctif de la marque antérieure

Le caractère distinctif de la marque antérieure est l’un des facteurs à prendre en considération lors de l’appréciation globale du risque de confusion.

Selon l’opposante, la marque antérieure a fait l’objet d’un usage intensif et jouit d’une protection élargie. Toutefois, pour des raisons d’économie de procédure, il n’est pas nécessaire d’examiner en l’espèce les preuves déposées par l’opposante afin d’étayer cette assertion (voir ci-dessous, dans «Appréciation globale»).

Par conséquent, l’appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure reposera sur son caractère distinctif intrinsèque. En l’espèce, la marque antérieure dans son ensemble n’a de signification en rapport avec aucun des produits en cause du point de vue du public du territoire pertinent. Dès lors, le caractère distinctif de la marque antérieure doit être considéré comme normal.

  1. Appréciation globale, autres arguments et conclusion

L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits et services peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement (29/09/1998, C39/97, Canon, EU:C:1998:442, § 17).

En l’espèce, les produits ont été jugés identiques et similaires à différents degrés. Les marques sont similaires à un degré moyen du point de vue visuel. Ils présentent un degré de similitude phonétique au-dessus de la moyenne et sont hautement similaires du point de vue conceptuel, dans la mesure où ils ont en commun l’élément distinctif et indépendant « 51 » qui constitue l’intégralité de la marque antérieure. Le caractère distinctif de la marque antérieure a été considéré comme normal.

Les signes ne diffèrent que par l’élément additionnel « E.T. » de la marque contestée. Il convient de garder à l’esprit le fait que les produits concernés sont des boissons et, que, celles-ci étant fréquemment commandées dans des établissements bruyants (bars, discothèques), la similitude phonétique entre les signes est particulièrement pertinente (voir l’arrêt du 15/01/2003, T99/01, Mystery, EU:T:2003:7, § 48, qui suit ce raisonnement). Or, bien que situé en seconde position dans le signe, l’élément commun « cinquante et un » comprend deux fois plus de syllabes que l’élément « E.T. », il doit être rappelé qu’il n’est pas d’usage de prononcer les points. Ce qui implique que la similitude phonétique est plus élevée que la moyenne.

Par conséquent, les différences entre les signes ne sont pas en mesure de neutraliser les similitudes marquantes et exclure un risque de confusion. En d’autres termes, la présence du seul élément verbal additionnel « E.T. » n’éclipse en aucun cas l’élément commun « 51 » qui est totalement distinctif et individualisé dans chaque signe.

Le risque de confusion comprend le risque d’association et, dans le cas présent, le signe contesté pourrait être perçu comme étant une déclinaison de la marque antérieure protégeant une nouvelle gamme de produits. Ainsi, le public pourra être amené à penser que les produits contestés identiques et similaires à ceux de la marque antérieure proviennent de la même entreprise ou d’entreprises économiquement liées. En effet, il est tout à fait concevable que le consommateur concerné perçoive la marque contestée comme une sous-marque, une variante de la marque antérieure, configurée d’une manière différente selon le type de produits qu’elle désigne (voir arrêt du 23/10/2002, T104/01, Fifties, EU:T:2002:262, § 49).

À la lumière des éléments qui précèdent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public même pour les produits faiblement similaires.

L’opposition est dès lors fondée sur la base de l’enregistrement français n° 1 698 173 de l’opposante. Il en résulte que la marque contestée doit être rejetée pour tous les produits contestés.

Étant donné que l’opposition est accueillie sur la base du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, il n’est pas nécessaire d’apprécier le caractère distinctif élevé de la marque de l’opposante en raison de sa renommée telle que revendiquée par l’opposante. Le résultat serait le même, même si la marque antérieure jouissait d’un caractère distinctif élevé.

Étant donné que le droit antérieur français n° 1 698 173 conduit à l’acceptation de l’opposition et au rejet de la marque contestée pour tous les produits contre lesquels l’opposition était formée, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres droits antérieurs invoqués par l’opposante (16/09/2004, T-342/02, Moser Grupo Media, S.L., EU:T:2004:268).

L’opposition étant accueillie dans son intégralité sur la base du motif énoncé à l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE, il n’est pas nécessaire d’examiner l’autre motif sur lequel l’opposition est fondée, à savoir celui prévu à l’article 8, paragraphe 5, du RMUE.

FRAIS

Conformément à l’article 85, paragraphe 1, du RMUE, la partie perdante dans une procédure d’opposition supporte les frais et taxes exposés par l’autre partie.

La demanderesse étant la partie perdante, elle doit supporter la taxe d’opposition ainsi que les frais exposés par l’opposante aux fins de la présente procédure.

Conformément à la règle 94, paragraphes 3 et 6 et à la règle 94, paragraphe 7, point d), sous i), du REMUE, les frais à rembourser à l’opposante sont la taxe d’opposition et les frais de représentation dont le montant est fixé dans la limité du taux maximal déterminé dans le REMUE. En l’espèce, l’opposante n’a pas nommé de mandataire agréé au sens de l’article 93 du RMUE et n’a dès lors pas engagé de frais de représentation.

La division d’opposition

Carlos MATEO PÉREZ

Richard BIANCHI

Inés GARCIA LLEDÓ

Conformément à l’article 59 du RMUE, toute partie lésée par cette décision peut former un recours à son encontre. Conformément à l’article 60 du RMUE, le recours doit être formé par écrit auprès de l’Office dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la présente décision. Il doit être déposé dans la langue de procédure de la décision attaquée. En outre, un mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé par écrit dans un délai de quatre mois à compter de cette même date. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours de 720 EUR.

Le montant déterminé lors de la répartition des frais ne peut être révisé que par une décision de la division d’opposition, sur requête. Conformément à la règle 94, paragraphe 4, du REMUE, la requête doit être présentée dans le délai d’un mois après la notification de la répartition des frais et n’est réputée présentée qu’après paiement de la taxe de réexamen de 100 EUR (annexe I A, paragraphe 33, du RMUE).

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